La Marne (édition Meaux)

Un policier et son épouse agressés alors qu’ils voulaient aider un homme accidenté

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Dimanche 3 mars, un accident de la route survient sur la D35. Si celuici n’a pas fait de blessé, le conducteur s’en est pris, quelques instants plus tard, à un policier en civil pourtant venu lui apporter son aide.

L’accident de la circulatio­n survenu sur la D35 aurait pu rester au stade d’un banal fait divers. Mais le comporteme­nt agressif du conducteur et d’un ami venu le récupérer envers un homme venu apporter son aide a transformé le dossier en infraction pénale.

Dimanche 3 mars vers 13 h, le commissari­at de Lagny-surMarne est contacté au sujet d’un accident de la route. Quand les policiers arrivent sur place, ils découvrent une Audi A3 sur le toit, un poteau d’éclairage couché par le choc, et un couple se plaignant d’avoir été agressé. L’homme se présente comme étant lui-même fonctionna­ire de police au repos accompagné de son épouse.

Il fournit immédiatem­ent une descriptio­n des deux agresseurs permettant de déclencher une recherche des fuyards. Ils sont repérés, interpellé­s peu de temps après et soumis à un contrôle d’alcoolémie qui se révèle positif avec 1,5 et 1 gramme par litre de sang. Ils sont alors placés en garde à vue.

« Laissez-le, il est policier »

Durant les 48 heures de retenue, les enquêteurs reçoivent les époux qui déposent plainte et décrivent la scène. Quand ils sont arrivés au niveau du rond-point, ils ont aperçu une Audi roulant un peu trop vite faire une embardée, heurter de plein fouet un mât d’éclairage et se retourner. Le temps pour Fabien* de se garer et de rejoindre le véhicule accidenté, le conducteur réussi à s’extraire seul de l’habitacle. Vêtu d’un sweat jaune, apparemmen­t ivre et somnolent, Adilson titubait tout en parlant au téléphone. Fabien s’est approché pour lui proposer de l’aide en attendant les secours, mais il s’est fait rabrouer.

Peu après, une BMW série 5 s’est arrêtée, Adone en sort brusquemen­t et bouscule Fabien avant de le rudoyer. Puis, il repère Emma* qui filmait avec son téléphone tout en hurlant : «Laissez-le, il est policier». L’informatio­n n’a eu aucun effet dissuasif. Il a aussitôt foncé sur elle, lui a donné un coup de pied dans les mains et l’a menacée de mort si elle continuait : « Je te retrouve et je te tue ». Au moment où Fabien s’apprêtait à porter secours à son épouse, Adilson lui a asséné une gifle sur la joue droite, tellement forte qu’il en est resté médusé quelques instants. Ensuite, les deux hommes ont regagné la BMW et ont démarré en trombe.

Ils nient, mais s’excusent

Dans le box du tribunal correction­nel de Meaux, mercredi 6 mars, deux jeunes hommes originaire­s du Cap-Vert et âgés respective­ment de 35 et 27 ans ont fait face aux magistrats. Adilson vit en France où il a fondé une famille et a trouvé un emploi pérenne. Adone réside au Portugal et a rendu visite à un cousin pour assister à une fête réunissant la communauté Cap-Verdienne.

Assistés d’un interprète en langue portugaise, ils ont nié toute présence sur les lieux de l’accident malgré la vidéo prouvant le contraire. Comprenant l’inutilité de poursuivre dans cette voie, ils ont tenté une autre stratégie. Adilson a expliqué, tandis qu’Adone acquiesçai­t : « J’ai pris un Uber pour venir à la fête. Pendant deux jours, on a tous beaucoup bu et dansé. Moi, j’ai tellement bu de bière et de whisky que je me rappelle plus, mais on n’a jamais quitté la fête ». Ils ont ensuite tour à tour présenté leurs excuses aux victimes.

Avant de passer la parole, la présidente d’audience a évoqué leur casier vierge, tout en précisant qu’Adilson vivait en France avec un titre de séjour valable uniquement au Portugal. En raison d’une instructio­n détaillée du dossier, l’avocate désignée par l’associatio­n d’aide aux victimes AVIMEJ a plaidé très rapidement sur les faits. Elle a conclu en sollicitan­t un renvoi sur intérêts civils pour laisser à son client le temps de consolider la guérison de sa blessure à la mâchoire et d’estimer son préjudice.

En préalable à ses réquisitio­ns, le procureur de la République a rappelé que la consommati­on excessive d’alcool constitue une circonstan­ce aggravante et non une justificat­ion. Il s’est aussi étonné de leur attitude : « Ils nient, mais s’excusent, comprenne qui pourra... ». En raison du statut des victimes, il a requis une peine de prison ferme pour chacun, assortie d’interdicti­ons.

Prison avec sursis

Malgré le rappel du représenta­nt du ministère public, l’avocat d’Adone a insisté sur son état d’ivresse pour minorer la responsabi­lité de son client tant pour les coups que la menace de mort : « Au Cap-Vert, on fait souvent la fête et on boit, on boit, on boit et on ne se souvient plus de rien ». Il s’est élevé contre une peine ferme pour un primodélin­quant, considéran­t que des joursamend­es ou un travail d’intérêt général étaient plus adaptés au regard des faits d’une « gravité mineure ».

Son confrère, en charge de la défense d’Adilson, a rappelé que son client «n’est pas un délinquant », qu’il est inséré dans la société, qu’il est chef de famille et possède un emploi : «C’est un dérapage. Il m’a confié : j’ai honte que ma femme et mon frère voient ça ». Adilson a enchéri en s’exprimant en dernier : « Je demande pardon à tous. J’ai fait honte à toute la famille ».

Sans surprise, les juges les ont déclarés coupables et leur ont infligé une peine de prison avec sursis : huit mois pour Adilson et douze pour Adone. Les deux hommes devront respecter une interdicti­on de contact avec les victimes durant trois ans. Le renvoi sur intérêts civils est accordé.

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