En mesurant le bruit, ils conquièrent le monde !
L’application Noise Capture, en partie développée par un laboratoire de l’Université Gustave Eiffel, permet de mesurer le volume sonore d’un lieu et de le rentrer dans une base de données mondiale. Elle rencontre un franc succès.
C’est une application qui risque de faire beaucoup de bruit ! En tout cas, depuis le début de son développement il y a quelques années, elle fait son petit bonhomme de chemin. L’application Noisecapture, comprenez « capture de bruit », développée par différents chercheurs de l’université Gustave Eiffel, basée à Champssur-Marne, délocalisés dans un bureau à Nantes (Loire-Atlantique), et du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) permet de mesurer l’environnement sonore et d’alimenter une cartographie mondiale.
Genèse du projet
Tout a commencé au début des années 2010, lorsque les chercheurs du CNRS ont collaboré avec ceux de l’Umrae, pour Unité mixte de recherche en acoustique environnementale, l’un des laboratoires de l’Université Gustave Eiffel. « L’idée était de développer une approche qui couplait les modèles acoustiques avec ceux de la carte. Jusqu’alors les deux mondes étaient relativement séparés, il était donc difficile de voir les résultats acoustiques sur une carte. Avec nos travaux, tout était au même endroit, dans le même outil. Il devenait donc possible de visualiser les niveaux sonores sur une carte, et de croiser cette information avec des données géographiques, et donc de calculer de nouveaux indicateurs comme l’exposition au bruit des populations », se souvient Gwendall Petit, qui a travaillé sur le développement de Noisecapture.
Alors que les smartphones devenaient de plus en plus présents dans la société, ils ont eu l’idée de transposer le modèle qui existait jusqu’alors à plus grande échelle. « Les modèles acoustiques sont alimentés avec des données plus ou moins fiables (trafic routier, niveaux sonores…) et souvent disponibles qu’en quelques points du territoire. Avec l’approche NoiseCapture, on cherche à voir s’il est possible d’alimenter de tels modèles avec des données présentes en plus grande quantité, même si elles ont une qualité moindre », explique-t-il.
Grâce aux téléphones portables, le nombre de relevés peut s’accroître. « Ils sont certes d’une qualité moindre, mais comme il y en a plus, c’est positif. Et cela peut permettre d’améliorer le modèle », poursuit-il.
Les premiers développements arrivent donc en 2015, et le projet sort officiellement en septembre 2017. Avec succès. « Depuis, nous en sommes à environ 200 mesures chaque jour, réalisées dans quinze pays dans le monde, en moyenne », souligne Gwendall Petit.
Un fonctionnement simple et utile
L’application est gratuite et fonctionne sur le principe de l’open data : toutes les données sont diffusées librement. Pour l’utiliser, c’est un jeu d’enfant. « L’application, après avoir été téléchargée, enregistre l’environnement sonore, mais seuls les niveaux sonores sont extraits, pas la piste audio, préservant ainsi la vie privée des utilisateurs », détaille-t-il.
Après cela, un court questionnaire demande à l’utilisateur sa sensation vis-à-vis du bruit qu’il vient d’enregistrer, mais aussi d’entrer une rapide description : lieu, bruit prédominant, circonstances de l’enregistrement. Une fois ces informations enregistrées, un graphique apparaît et résume votre participation. « Une fois qu’il y a une connexion à Internet, les données sont transmises sur un serveur, et la carte est actualisée », souligne Gwendall Petit.
Avec plus de 1 400 jours de collecte de données cumulés, l’application est aujourd’hui très utile à la sensibilisation au bruit, notamment dans les établissements scolaires, l’écrasante majorité des adolescents disposant aujourd’hui d’un téléphone portable connecté. « On remarque aussi un intérêt des collectivités, qui créent même des “‘Noisecapture party ”, une campagne de mesure collective organisée sur un lieu et un temps donnés, permettant ainsi de fédérer un public autour de la thématique, comme à Bastia (HauteCorse) », cite-t-il en exemple.
Toutes les données collectées à travers ces différents projets permettent aussi d’aider la recherche. « Cela nous sert notamment à travailler sur la reconnaissance de source ou encore sur la question de l’alimentation des modèles pour produire des cartes de bruit réglementaires à partir de données hétérogènes et mobiles, venant des smartphones », précise-t-il.
Maintenant, à vous de jouer !
■ L’application est disponible gratuitement pour les utilisateurs Android, sur Play Store.