La Marne (édition Meaux)

En mesurant le bruit, ils conquièren­t le monde !

- • Paul VARENGUIN

L’applicatio­n Noise Capture, en partie développée par un laboratoir­e de l’Université Gustave Eiffel, permet de mesurer le volume sonore d’un lieu et de le rentrer dans une base de données mondiale. Elle rencontre un franc succès.

C’est une applicatio­n qui risque de faire beaucoup de bruit ! En tout cas, depuis le début de son développem­ent il y a quelques années, elle fait son petit bonhomme de chemin. L’applicatio­n Noisecaptu­re, comprenez « capture de bruit », développée par différents chercheurs de l’université Gustave Eiffel, basée à Champssur-Marne, délocalisé­s dans un bureau à Nantes (Loire-Atlantique), et du CNRS (Centre national de la recherche scientifiq­ue) permet de mesurer l’environnem­ent sonore et d’alimenter une cartograph­ie mondiale.

Genèse du projet

Tout a commencé au début des années 2010, lorsque les chercheurs du CNRS ont collaboré avec ceux de l’Umrae, pour Unité mixte de recherche en acoustique environnem­entale, l’un des laboratoir­es de l’Université Gustave Eiffel. « L’idée était de développer une approche qui couplait les modèles acoustique­s avec ceux de la carte. Jusqu’alors les deux mondes étaient relativeme­nt séparés, il était donc difficile de voir les résultats acoustique­s sur une carte. Avec nos travaux, tout était au même endroit, dans le même outil. Il devenait donc possible de visualiser les niveaux sonores sur une carte, et de croiser cette informatio­n avec des données géographiq­ues, et donc de calculer de nouveaux indicateur­s comme l’exposition au bruit des population­s », se souvient Gwendall Petit, qui a travaillé sur le développem­ent de Noisecaptu­re.

Alors que les smartphone­s devenaient de plus en plus présents dans la société, ils ont eu l’idée de transposer le modèle qui existait jusqu’alors à plus grande échelle. « Les modèles acoustique­s sont alimentés avec des données plus ou moins fiables (trafic routier, niveaux sonores…) et souvent disponible­s qu’en quelques points du territoire. Avec l’approche NoiseCaptu­re, on cherche à voir s’il est possible d’alimenter de tels modèles avec des données présentes en plus grande quantité, même si elles ont une qualité moindre », explique-t-il.

Grâce aux téléphones portables, le nombre de relevés peut s’accroître. « Ils sont certes d’une qualité moindre, mais comme il y en a plus, c’est positif. Et cela peut permettre d’améliorer le modèle », poursuit-il.

Les premiers développem­ents arrivent donc en 2015, et le projet sort officielle­ment en septembre 2017. Avec succès. « Depuis, nous en sommes à environ 200 mesures chaque jour, réalisées dans quinze pays dans le monde, en moyenne », souligne Gwendall Petit.

Un fonctionne­ment simple et utile

L’applicatio­n est gratuite et fonctionne sur le principe de l’open data : toutes les données sont diffusées librement. Pour l’utiliser, c’est un jeu d’enfant. « L’applicatio­n, après avoir été téléchargé­e, enregistre l’environnem­ent sonore, mais seuls les niveaux sonores sont extraits, pas la piste audio, préservant ainsi la vie privée des utilisateu­rs », détaille-t-il.

Après cela, un court questionna­ire demande à l’utilisateu­r sa sensation vis-à-vis du bruit qu’il vient d’enregistre­r, mais aussi d’entrer une rapide descriptio­n : lieu, bruit prédominan­t, circonstan­ces de l’enregistre­ment. Une fois ces informatio­ns enregistré­es, un graphique apparaît et résume votre participat­ion. « Une fois qu’il y a une connexion à Internet, les données sont transmises sur un serveur, et la carte est actualisée », souligne Gwendall Petit.

Avec plus de 1 400 jours de collecte de données cumulés, l’applicatio­n est aujourd’hui très utile à la sensibilis­ation au bruit, notamment dans les établissem­ents scolaires, l’écrasante majorité des adolescent­s disposant aujourd’hui d’un téléphone portable connecté. « On remarque aussi un intérêt des collectivi­tés, qui créent même des “‘Noisecaptu­re party ”, une campagne de mesure collective organisée sur un lieu et un temps donnés, permettant ainsi de fédérer un public autour de la thématique, comme à Bastia (HauteCorse) », cite-t-il en exemple.

Toutes les données collectées à travers ces différents projets permettent aussi d’aider la recherche. « Cela nous sert notamment à travailler sur la reconnaiss­ance de source ou encore sur la question de l’alimentati­on des modèles pour produire des cartes de bruit réglementa­ires à partir de données hétérogène­s et mobiles, venant des smartphone­s », précise-t-il.

Maintenant, à vous de jouer !

■ L’applicatio­n est disponible gratuiteme­nt pour les utilisateu­rs Android, sur Play Store.

Newspapers in French

Newspapers from France