Plouézec célèbre les 75 ans de l’opération Fahrenheit
La salle du conseil de la mairie accueille, depuis samedi 4 novembre, une exposition mise sur pieds par Michel Guillou et consacrée à l’Opération Fahrenheit qui a eu lieu à la pointe de Bilfot dans la nuit du 11 au 12 novembre 1942.
Dans la nuit du 11 au 12 novembre, une vedette anglaise s’approche silencieusement de la pointe de Bilfot. À son bord, le pilote et onze « commandos » surentraînés dans les nombreux centres que compte le RoyaumeUni.
Au début de l’année 1942, sous l’impulsion de Lord Mountbatten, futur vice-roi des Indes (qui visitera Paimpol quelques années plus tard (en 1961 lors du jumelage avec sa ville de Romsey), une série d’actions commando est envisagée sur le sol français. Le but est de créer l’insécurité parmi les troupes allemandes en leur instillant l’idée qu’ils peuvent être attaqués n’importe où et n’importe quand.
La forme Joubert
Déjà, le 27 mars 1942, une première attaque d’envergure a lieu à Saint-Nazaire où des commandos anglais lancent un bateau bourré d’explosif sur la plus grande forme de radoub de la Côte Atlantique, la forme Joubert. L’opération est un succès total.
Les Britanniques ont pris le soin de différer l’explosion de sorte que les soldats allemands sont nombreux à bord quand le bateau explose le lendemain. La forme Joubert hors service, les Allemands ne pourront plus mettre leurs plus gros bateaux en carène en France et devront aller jusqu’en Norvège pour trouver des installations assez grandes.
Plouézec et le sémaphore de Bilfot seront le deuxième objectif breton des Alliés sur le sol de la France occupée. « Churchill, voulait qu’une opération ait lieu sur le sol français à la date symbolique du 11 novembre », explique Michel Guillou, historien spécialiste de l’Opération Fahrenheit et auteur en 1994 du livre éponyme.
Fahrenheit sera un véritable « cas d’école ». Les Anglais disposent d’une multitude de dossiers regroupant les objectifs possibles. Mais l’intervention à Plouézec présente un maximum de garanties. Au cours du mois de mai 1941, Claude Robinet, alias Claude Rivière, est un jeune résistant chargé de surveiller discrètement les allées et venues des Allemands.
Plan détaillé
Un jour, profitant de l’absence des soldats allemands du sémaphore de Bilfot, il y pénètre et en ressort avec les plans de la défense côtière allemande sur la Manche et… un portrait d’Hitler qui lui vaudra d’être viré de l’école des Soeurs de la rue Saint-Vincent à Paimpol où il est étudiant.
Les documents volés sont envoyés à Londres et, par l’intermédiaire de la comtesse de Mauduit, Claude Robinet va prendre le même chemin. Les Alliés disposent donc d’un plan détaillé mais aussi d’une « source sûre » en la présence d’un témoin visuel de l’endroit visé par le raid.
Dans la nuit du 11 au 12 novembre, une vedette anglaise s’approche donc silencieusement de la pointe de Bilfot. Le but est d’attaquer furtivement le sémaphore, de faire des prisonniers et de repartir sans bruit. On imagine sans mal l’inquiétude des soldats allemands constatant la disparition inexpliquée d’un ou plusieurs de leurs camarades… Mais cela ne va pas se passer comme prévu.
Sémaphore détruit
Lors de la phase d’observation précédant l’attaque, les commandos prennent conscience d’un risque de présence d’un champ de mines sur le côté où l’attaque est prévue. Plus question de frapper de façon furtive. Pas question non plus d’être venus jusque-là pour rien.
Les commandos déclenchent alors une fusillade nourrie au cours de laquelle un soldat allemand est mortellement touché et repartent sans aucune perte, laissant les soldats du sémaphore complètement désorientés. Parmi les membres du commando anglais figure un certain Ronald Roberts qui était déjà de l’expédition de Saint-Nazaire et qui aura l’occasion de revenir quelques fois à Plouézec, de manière plus pacifique.
Le sémaphore lui, sera détruit, probablement en 1943. L’Opération Fahrenheit va avoir pour conséquence un renforcement des défenses côtières qui conduira à un arrêt des raids alliés. En effet, il s’agit de ne pas compromettre l’évasion par l’intermédiaire de réseaux comme Bonaparte, d’aviateurs alliés ou de résistants en danger. Seule l’Île d’Ouessant échappe à cette interdiction et un nouveau raid y aura lieu en septembre 1943.
Jusqu’au 18 novembre
L’exposition sur l’opération Fahrenheit est visible jusqu’au 18 novembre aux heures d’ouverture de la mairie l’après-midi. Elle est gratuite et mise sur pied avec le concours de la section locale de l’UFAC et de la 16e Section des Médaillés Militaires. « Le but, souligne Michel Guillou, est de raconter aux Plouézecains, et particulièrement aux nouvelles générations, un pan de l’histoire de leur commune. »
Outre l’exposition, Michel Guillou animera vendredi 10 novembre à 20 h 30 une causerie sur l’Opération qui sera commémorée dimanche 12 novembre à 11 h à la Pointe de Bilfot devant la stèle qui lui est consacrée.