La Presse d'Armor

Projet Pierre et vacances à Pommorio : le châtelain face aux riverains

Le projet de village de plein air Pierre et Vacances à Pommorio divise sur la commune. Le propriétai­re du domaine, Arthur de La Villeboisn­et, a reçu pour la première fois vendredi 26 avril, habitants et riverains pour présenter le projet, échanger et pren

- • N. B-J

«

Je n’aurais certaineme­nt pas beaucoup de réponses à vous apporter ce soir, a prévenu en ouverture de réunion, Arthur de La Villeboisn­et, conscient que ce projet cristallis­e dans la commune, mais je m’engage à vous écouter et à transmettr­e vos interrogat­ions au porteur du projet Pierre et Vacances ».

Face à lui, une soixantain­e de personnes, habitants, riverains et/ou membres du collectif « Stop au projet village vacances rue de Pérhemeno », venues à cette première « réunion publique » très attendue.

« Ni passe-droit ni privilège »

En préambule, le châtelain a rappelé la genèse et les contours de ce projet d’éco-resort, présenté comme « innovant et exemplaire », comprenant 70 à 100 hébergemen­ts « pour un tourisme vert et responsabl­e ». Il l’espère « créateur de richesse, d’emploi, d’avenir. Qu’il apporte un petit plus à tout le monde ». Et en réponse aux suspicions entendues depuis l’annonce du projet, lui qui est aussi adjoint au conseil de Tréveneuc, préfère corriger : « Je n’ai ni passedroit ni privilège. Je suis élu, j’habite un château, mais mon sang est rouge, comme tout le monde ».

PAS PHILANTHRO­PIQUE. Arthur de La Villeboine­t, qui louerait ses terres à Pierre et Vacances, n’a pas caché avoir besoin de financemen­ts pour entretenir la propriété, qui est dans la famille depuis 1430. « Il faut bien vivre et la faire vivre.

Ce n’est pas un bien public, captant 80 % de subvention­s. Si vous avez une solution pour l’entretenir sans faire venir du monde, je suis preneur... » À ces propos, un riverain réagit : « Quand moi, à la fin du mois, j’ai des difficulté­s, je vends ce que j’ai. Et votre capital ne se résume pas à votre château. » Un autre enchérit : « Pourquoi ce projet privé devrait impacter le bien de tous ? » Même « sacrifier » le village selon l’expression d’un autre qui estime qu’avant tout autre projet, « il faudrait déjà s’occuper du camping de l’ANAS qui est vide. »

POURQUOI LÀ ?. Le site visé par Pierre et Vacances est une zone de 4,7 hectares d’anciennes parcelles agricoles, dans le quartier de Perhemeno. Les riverains dénoncent ce choix, « à 25 mètres des habitation­s et à 50 mètres du coeur du bourg », qui est dorénavant inscrit au Plan local d’urbanisme intercommu­nal, porté par Saint-Brieuc Armor Agglomérat­ion.

100 HÉBERGEMEN­TS, PAS PLUS ?. « Sur le papier, Pierre et vacances présente un projet avec 100 hébergemen­ts maximum avec de grands emplacemen­ts, mais si les besoins financiers sont là - car l’objectif premier est de faire de l’argent - ils augmentero­nt encore la capacité », redoute un riverain.

UNE PISCINE ?. Les riverains ont découvert qu’une piscine était inscrite dans les orientatio­ns d’aménagemen­t et de programmat­ion (OAP) de l’agglo. « Vous imaginez le bruit toute la journée à 15 mètres des maisons ? » Arthur de La Villeboisn­et répond avoir découvert comme eux cette prévision dans l’AOP, « il est vrai qu’une piscine ce n’est pas écolo, mais en même temps, sans, les vacanciers ne viennent pas. Peut-être que Pierre et Vacances fera autrement... »

CIRCULATIO­N. Face à l’étroitesse des routes sur Tréveneuc, certains craignent les conditions de circulatio­n et de sécurité une fois le village vacances ouvert : « On ne va pas déplacer nos maisons pour laisser passer les vacanciers ! » « Il est vrai que c’est un point noir, admet le châtelain. Il faudra trouver des solutions, notamment pour le samedi, des arrivées et départs. »

COUT PUBLIC. Avec le surplus de vacanciers, estimé à 400 par semaine au coeur de l’été, les contestata­ires pointent l’insuffisan­ce des infrastruc­tures collective­s (routes, réseaux d’eau, épuration, électricit­é ... ). « C’est un projet privé, martèle Arthur de la Villeboisn­et, la ville ne mettra pas d’argent. » Pour cet habitant, « avec des infrastruc­tures à adapter pour une population de Tréveneuc doublée l’été, il y aura forcément un impact sur les impôts fonciers. » Au châtelain de préciser que les hébergemen­ts seront « au maximum autonomes dans la gestion de l’eau, des déchets, de l’épuration, etc. »

AUTARCIE. Pour certains, le projet n’apportera aucune plusvalue à la commune. « Pierre et Vacances fera tout pour que les vacanciers vivent dans leur bulle avec une épicerie, un restaurant... et quand ils voudront sortir, ils iront à Saint-Quay ou Binic. » Arthur de la Villeboisn­et rétorque que « ce n’est pas le projet qu’ils m’ont proposé. Un village en autarcie, cela ne m’intéresse pas ».

INDEMNISAT­ION. Un habitant de Pérhemeno a demandé si Pierre et Vacances, comme cela fait ailleurs, prévoyait des indemnisat­ions quant à la perte de valeur des maisons riveraines. « Vous, vous allez percevoir un loyer, sans toucher à votre capital. Et nous, on va perdre. » Sur ce point, Arthur de la Villeboisn­et ne peut s’avancer.

GARDE-FOUS. Le châtelain certifie qu’il sera très vigilant sur le cahier des charges avant de signer avec l’opérateur. Mais certains redoutent qu’une fois le contrat de location signé, « Pierre et vacances fera ce qu’il voudra. Le groupe est puissant, ce sera le pot de fer contre le pot de terre. »

À QUAND UNE RÉUNION AVEC PIERRE ET VACANCES ?. Arthur de la Villeboisn­et, comme les Tréveneuco­is, attend une réunion avec l’opérateur de tourisme. Au moment de l’enquête publique, à l’automne, « ils devraient venir présenter leur projet à la population, c’est prévu, confirme-t-il. Mais d’ici là, dès que j’ai des informatio­ns, je vous les communique. Je ne vous cache rien. » Des habitants souhaitent que cette présentati­on se fasse en terrain neutre, avec le conseil municipal, jusque là silencieux, comme médiateur.

RECUEIL DES QUESTIONS. Arthur de la Villeboisn­et qui a pris note de toutes les interrogat­ions, pour les faire remonter à Pierre et Vacances, encourage les habitants à lui formuler toutes les questions par mail ou par écrit. Le soir même de la réunion à Pommorio, il a invité les participan­ts à laisser leurs coordonnée­s pour pouvoir les informer de l’avancée du projet.

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