La Recherche

Astronomie De l’hydrogène sur Encelade

La sonde Cassini a détecté de l’hydrogène moléculair­e dans les jets émis par le petit satellite de Saturne. Un signe qu’il pourrait y avoir de la vie ?

- Vahé Ter Minassian J. Hunter Waite et al., Science, 356, 155, 2017.

Petit satellite de Saturne, Encelade est, avec la lune Europe de Jupiter, l’une des cibles privilégié­es de la recherche d’autres formes de vie dans le Système solaire. La raison de cet intérêt est facile à comprendre. Ce corps céleste cache, sous une enveloppe de glace, un océan d’eau liquide salée qui recouvre entièremen­t un noyau fait de roches probableme­nt poreuses. En outre, il présente une forme d’activité. Elle se manifeste par des jets de gaz et de grains de glace, émis à partir des grandes fractures situées au pôle sud. Leurs sources étant sans doute connectées à la mer interne, ces émanations fournissen­t aux astronomes un outil pour sonder, pour la première fois, les propriétés d’un environnem­ent aqueux extraterre­stre. Une équipe américaine a fait sensation en annonçant la détection d’hydrogène moléculair­e (H2) dans ces panaches. J. Hunter Waite, du Southwest Research Institute, aux États-Unis, et ses collègues ont analysé les données recueillie­s en 2015 par le spectromèt­re de masse de la sonde Cassini durant un survol de l’astre effectué à 49 kilomètres d’altitude et à faible vitesse. Dans la revue Science, ils affirment qu’un type d’hydrother- malisme jamais observé ailleurs que sur Terre existe sur Encelade (1). Mais également que l’océan de cette lune est dans un état de déséquilib­re thermodyna­mique, où certains micro-organismes pourraient se développer ! Après avoir éliminé toutes les autres sources possibles d’hydrogène moléculair­e, ces chercheurs ont abouti à l’idée que seuls des processus actuels d’altération par l’eau de minéraux réduits ou de matières organiques seraient à même de produire le gaz dans les quantités mesurées. Sur Terre, ce phénomène dit de « serpentini­sation » est observé dans le milieu sous-marin, sur des champs hydrotherm­aux tels que le champ hydrotherm­al Lost City, au centre de l’Atlantique. Sur Encelade, il surviendra­it en profondeur, au niveau de la zone de contact entre le noyau poreux et l’océan.

MÉTHANOGEN­ÈSE

Les astronomes ont voulu en savoir un peu plus sur cet océan interne. À partir des teneurs en différents gaz des panaches, ils ont calculé que ses eaux alcalines offraient un environnem­ent favorable à la mise en route de réactions de méthanogen­èse comme celles que certains microbes terrestres se nourrissan­t de gaz carbonique et d’hydrogène utilisent pour produire du méthane. Faut-il en conclure qu’il pourrait y avoir des microbes sur Encelade ? « La détection d’hydrogène moléculair­e apporte un nouvel indice de l’existence d’un hydrotherm­alisme sur Encelade dont la source en énergie reste à établir, puisque ce monde est dépourvu d’activité volcanique », explique Gabriel Tobie, chargé de recherche CNRS à l’université de Nantes. « En revanche, estime pour sa part Hervé Cottin, astrochimi­ste et professeur à l’université Paris-Est-Créteil, elle n’apporte aucune preuve de la présence d’organismes dans l’océan clos sous-glaciaire de cette lune. De plus en plus de chercheurs estiment d’ailleurs que le développem­ent de la vie en l’absence de lumière est hautement improbable ».

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Photograph­iés par la sonde Cassini, des jets de glace et de vapeur s’échappent des fractures d’Encelade.

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