Le devenir incertain des tourbières et du permafrost
Avec le réchauffement climatique, certains milieux où l’activité microbienne est en temps normal très faible vont passer de puits de carbone à sources émettrices de CO2. C’est notamment le cas des tourbières, zones humides principalement situées en région boréale (latitudes comprises entre 50° et 70° nord), représentant 3 à
5 % de la surface terrestre émergée et stockant deux fois plus de carbone que l’ensemble des forêts du monde. « Ces milieux riches en matière organique sont aussi saturés en eau, ce qui empêche les micro-organismes de la décomposer, explique Nathalie Fromin, écologue au Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive, à Montpellier. Mais l’assèchement des tourbières dû au réchauffement climatique va permettre aux microorganismes d’utiliser cette matière organique comme source de carbone et de la minéraliser, libérant ainsi d’énormes quantités de CO2 dans l’atmosphère. »
La même situation se joue dans les permafrosts (ou pergélisols), ces sols gelés en permanence et qui représentent près de 20 % de la surface terrestre.
Les micro-organismes, transis par le froid, y sont dans un état latent, avec un métabolisme ralenti, piégés dans ce sol qui
« renferme à lui seul la moitié du carbone stocké dans les sols au niveau mondial, renseigne l’écologue. S’il commence à dégeler, cela va relancer l’activité microbienne, avec pour conséquence d’immenses relargages de CO2 mais aussi de méthane, qui en retour accéléreront l’effet de serre ». Ainsi, les émissions microbiennes de CO2 des régions polaires pourraient plus que doubler d’ici à 2100, soit une augmentation deux fois plus importante que dans le reste du monde (1). En cause : l’état semisaturé – c’est-à-dire ni trop sec ni trop humide – des sols qui dégèlent. Des conditions optimales pour la respiration microbienne.