Le Jardin d’Essai, à Alger
Les visiteurs du Jardin d’Essai à Alger ne peuvent manquer de faire une halte devant un immense dragonnier, « l’arbre de Tarzan ». Si les versions du film des années 1930 furent toutes tournées en studio à Hollywood, la persistance de la légende urbaine, qui imagine Johnny Weismuller à Alger en 1932, dit la puissance des imaginaires associés au jardin, ici celle d’une jungle qui aurait accueilli l’homme singe alors que le climat de la ville – méditerranéen – n’a rien de tropical. À l’échelle de l’empire français, le Jardin d’Essai, établi dès le début de l’invasion française, en 1832, constitue durant toute la période coloniale un lieu emblématique des ambitions françaises en matière de botanique, d’agronomie et d’agriculture coloniales.
Marqué par les règnes d’Auguste Hardy (18421867) et Auguste Rivière (1867-1877), deux de ses directeurs successifs, le jardin est une vitrine du gouvernorat général et de la politique d’acclimatation que la France s’applique à mettre en oeuvre en Algérie. Les eucalyptus qui vont être plantés le long des routes, des voies de chemin de fer et dans les villages de colonisation sont introduits d’abord au Jardin d’Essai, par Hardy, qui est en lien épistolaire étroit avec le directeur du jardin de Melbourne, en Australie, grand diffuseur de l’espèce à travers le monde. Moins glorieuse, car vite dépassée par les expérimentations en Afrique du Sud, la domestication des autruches est aussi tentée au Jardin d’Essai dans la seconde moitié du XIXe siècle par Hardy et Rivière. En 1878, huit couples de l’espèce y sont ainsi hébergés. Ce jardin est aussi un lieu de promenade et de sociabilité pour les Européens d’Alger, où sont aménagées des buvettes dans sa partie basse, qui permettent aux visiteurs, venus par le train, de se rafraîchir. Dans la partie haute, cachés des visiteurs, résident les gardiens qui travaillent dans le jardin.
Ils sont régulièrement secondés par des prisonniers chargés du gros oeuvre. Une maind’oeuvre gratuite que les directeurs du jardin sollicitent de l’administration.