Bientôt la fin de la lune de miel des Chinois et du Bordelais ?
Propriétés délaissées, confits sociaux, rentabilité en berne… les investisseurs chinois s’adaptent péniblement à l’économie du Bordelais. Et le cas du mystérieux magnat Qu Naijie n’arrange rien.
Il y a encore deux ans, les investisseurs chinois achetaient volontiers de belles propriétés bordelaises sans trop sourciller sur le nom de l’appellation, le sésame Bordeaux étant jugé sufsamment vendeur.
Depuis 2008, près de 90 propriétés ont ainsi été acquises par des Chinois. Avec, parfois, des couacs. Aux châteaux Grand Moueÿs (Entre-deux-Mers) et du Tourte, à côté de Cadillac, tous deux passés sous pavillon chinois, des confits sociaux ont éclaté. « Dans plusieurs propriétés, des fournisseurs ne sont pas payés » , observe Tierry Rustmann, de la Compagnie Bordelaise Viticole & Agricole, un cabinet de transactions spécialisé.
Où est passé M. Qu ?
À cela s’ajoutent les déboires de M. Qu Naijie, dirigeant du groupe industriel Haichang, originaire de Dalian, cité prospère du nord-est de la Chine.
Ce magnat aurait acheté pas moins de vingt-trois propriétés dans le Bordelais grâce à 32 millions d’euros de fonds publics chinois qui, selon une enquête des autorités chinoises, auraient été détournés. Difcile de vérifer auprès de M. Qu Naijie, totalement invisible dans le Bordelais (il n’a pas répondu à nos appels).
« Faux, c’est une rumeur ! Je l’ai vu en juin à Dalian, entouré de ministres et de dignitaires chinois. Pensez-vous que lui qui pèse plusieurs milliards a besoin de 32 millions d’argent public pour acheter des propriétés ? » , proteste Dominique Hébrard, copropriétaire, avec des Hongkongais, du château Trianon (Saint-Émilion).
« La lutte anticorruption et la fin des cadeaux aux fonctionnaires ont refroidi les nouveaux investisseurs » , analyse Daniel Carmagnat, de l’agence immobilière A2Z, qui fut le premier à vendre une propriété à des Chinois. Il enregistre une chute des transactions depuis un an. Et les acheteurs sont plus réticents depuis que les notaires français doivent signaler tout fnancement litigieux aux services fscaux.
« Les Chinois découvrent que faire du vin coûte cher et que la rentabilité n’est pas toujours au rendez-vous » , note Geoffroy Braichotte, chez Quatuor Vignobles, à Bordeaux.
Enfin des problèmes de communication et de gestion aboutissent à des confits sociaux. « Cela touche souvent les petites propriétés d’une valeur de 1 à 3 millions d’euros » , souligne Eddie Yuan, de Langfan Investment Shanghai Co. Présent en France et à Shanghai, il reconnaît qu’il n’a pas vendu une propriété en 2014.