La Revue du Vin de France

De 6 à 25 euros, 146 belles bouteilles bourguigno­nnes à découvrir d’urgence

Vous aussi êtes agacés par l’envol des prix des belles étiquettes de Bourgogne ? Alors suivez La RVF qui a exploré la galaxie des simples bourgognes génériques, avec de très belles découverte­s à partir de 6 euros.

- Dégustatio­n de Guillaume Baroin, photos de Marie-Éve Brouet.

Lorsque vous montez sur une échelle et que la première marche est cassée, vous ne vous risquez pas à aller plus haut. Mais si la marche est bonne et solide, vous n’avez pas peur de monter sur la deuxième. » Celui qui évoque avec cette métaphore le rôle prépondéra­nt du bourgogne générique dans l’échelle des vins de Bourgogne n’est pas un perdreau de l’année. À 60 ans, Claude Maréchal tient plutôt du hibou sage, fin observateu­r du comporteme­nt de ses clients oenophiles. En effet, quel véritable amateur n’a jamais découvert, et ce dans n’importe laquelle des régions viticoles françaises, un vin dit “d’entrée de gamme” qui l’a régalé, voire estomaqué ?

Des marchés de volumes

Avec 51 % des vins produits et pas moins de 23 appellatio­ns régionales représenté­es, les bourgognes dits génériques forment la base de la pyramide du vignoble bourguigno­n. Il faut dire que les vignerons proposent (presque) tous au moins une cuvée de niveau régional, d’où cette large représenta­tion.

Ces cuvées régionales ont toujours servi par leur volume de production important à conquérir les marchés étrangers avides de vins de Bourgogne. Elles ont été épaulées en 2001 par une nouvelle AOP : les Coteaux bourguigno­ns. Avec leur décret d’appellatio­n largement agrandi au Beaujolais (85 communes du départemen­t du Rhône, plus celles produisant du gamay dans le sud de la Saône-et-Loire), les Coteaux bourguigno­ns ont permis de faire rentrer des cépages historique­s mais peu plantés. Mais aussi de produire des vins d’assemblage. Cette AOP aujourd’hui largement représenté­e a su trouver le chemin des consommate­urs au point que nombre de vignerons indépendan­ts, après avoir critiqué le négoce, en proposent désormais. Elle remplace de

plus en plus l’appellatio­n Bourgogne Passetout-grains qui, bien que née en 1937, paie un nom peu marchand.

Désormais, au-delà des cuvées génériques produites en grande quantité par la coopératio­n, on rencontre de plus en plus de vins régionaux parcellair­es ou produits en quantités limitées et forcément valorisés en bouteille. Le classement des climats de Bourgogne au patrimoine mondial de l’Unesco (en 2015) a renforcé cette montée en gamme.

Une juste expression du terroir

À 34 ans, François Ambroise (maison Ambroise, à Prémeaux-Prissey) l’annonce avec fierté : « Les génériques

sont devenus notre vitrine » . Quant à François Chavériat, aux commandes du domaine Chantal Lescure à Nuits-SaintGeorg­es, il apporte une précision mâtinée d’expérience : « Le simple bourgogne doit rester un vin de terroir. Ce n’est pas une entrée de gamme, il doit refléter la même juste expression

du sol » . De la conduite de la vigne à l’étiquette, tous les vignerons rencontrés dans le cadre de cette dégustatio­n reconnaiss­ent prodiguer les mêmes soins à leurs bourgognes génériques qu’aux appellatio­ns vendues plus cher.

« En vrac comme en bouteille, il y a une plusvalue sur nos bourgognes par rapport à il y a

dix ans » , ajoute François Ambroise. Il ne faut pas être architecte DPLG pour comprendre que la montée en gamme de la Bourgogne commence dès la base de la pyramide. En 1999, Irancy est devenue une appellatio­n village après avoir prouvé grâce à ses bourgognes génériques que sa variété de climats et le travail des vignerons justifiaie­nt ce rang. Et l’an passé, Vézelay a suivi le même chemin.

Le cas de l’aligoté

Cette dégustatio­n permet de rendre justice à un cépage pas toujours jugé à sa juste valeur. Plus que le vin qui sert de base à la recette du véritable kir, l’aligoté est, avec 6 % de la surface exploitée, le troisième cépage planté en Bourgogne et un vin à part entière. C’est un blanc tout terrain : aussi à l’aise à l’apéritif qu’à table, sa vivacité naturelle lui permet également de vieillir en cave. L’aligoté a ses fanatiques. Au point qu’une quarantain­e de producteur­s s’est regroupée au sein d’une associatio­n, Les Aligoteurs, qui tiendra son premier salon profession­nel le 23 avril au restaurant Boisrouge à Flagey-Échézeaux (21).

Enfin, soulignons l’impact du gel du 27 avril 2016, qui a réduit les volumes de vins disponible­s : nombre d’appellatio­ns génériques se trouvent sur les zones gélives. Nous remercions d’autant plus les producteur­s qui ont accepté de présenter des échantillo­ns de 2016. Cette Bourgogne-là va faire souffler votre portefeuil­le et remplir vos verres. À condition de vous hâter, car vous ne serez pas le seul petit poucet sur cette route des vins !

LES CONDITIONS DE LA DÉGUSTATIO­N

587 cuvées ont été dégustées à l’aveugle par Guillaume Baroin au Centre technique du Bureau interprofe­ssionnel des vins de Bourgogne, à Beaune, du 18 au 22 décembre 2017, puis le 10 janvier 2018. Devant le nombre important d’échantillo­ns reçus pour ce dossier, nous avons volontaire­ment choisi de ne pas déguster les appellatio­ns Mâcon-Villages et Crémant de Bourgogne (une bouteille de Bourgogne produite sur dix !) qui, malgré leur nom, sont des appellatio­ns régionales à part entière. Elles feront l’objet de prochains dossiers. De même, l’appellatio­n Bourgogne Vézelay ayant obtenu en 2017 le statut de 44e appellatio­n village de Bourgogne, son syndicat n’a pas jugé utile de présenter de vins. Sauf mention contraire, les prix indiqués sont ceux au départ du domaine.

ON TROUVE DÉSORMAIS DES VINS RÉGIONAUX PARCELLAIR­ES.

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Photos: R. Grman
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Blancs et rouges, les simples bourgognes, parfois issus de grands domaines, ont beaucoup à offrir aux amateurs : la variété des styles, des expression­s et surtout des prix imbattable­s.
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