La Revue du Vin de France

200 ambassadeu­rs de notre culture

« UNE QUÉBÉCOISE ET UN PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE SONT DISTINGUÉS PAR LA RVF. »

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Une Québécoise peu connue en France et un président de la République sont distingués ce mois-ci par La RVF. La première parce qu’elle est, au nom de la Société des Alcools du Québec, la première acheteuse de vins français dans le monde. Qui, à l’instar de Catherine Dagenais, peut se targuer d’investir chaque année plus de 800 millions de dollars dans l’achat de vins français ? Par son truchement, les Québécois, fins connaisseu­rs de bourgognes, bordeaux et autres vins de Loire, méritent assurément cette place au sommet de notre palmarès des 200 personnali­tés les plus influentes du vin.

Le profil du second lauréat, Emmanuel Macron, est plus inattendu. Qu’on ne s’y méprenne pas : La RVF n’est pas tombée dans le piège d’une quelconque flagorneri­e élyséenne. Notre vote s’appuie sur des faits précis. Pour la première fois depuis plus de trente ans, on pourrait même dire depuis Georges Pompidou, un président de la République a pris publiqueme­nt position en faveur du vin, assurant qu’il en buvait « midi et soir » et écartant dès le début de son mandat « tout

amendement pour durcir la loi Évin » . Il faudra un jour revenir sur le bouleverse­ment pitoyable qui a conduit le pays du Montrachet et de Louis Pasteur à se doter d’une législatio­n anti-vin que seule une poignée de pays musulmans accentuent. Le développem­ent exponentie­l de la circulatio­n automobile y est pour beaucoup, boire du vin et conduire étant incompatib­les. Le pouvoir financier pris par les laboratoir­es pharmaceut­iques sur la politique aussi, nous évoquons régulièrem­ent le sujet.

Mais comment ne pas aussi pointer du doigt cette hypocrisie bien française : nos autorités sanitaires, toutes recrutées dans les catégories supérieure­s qui, pour la plupart, apprécient régulièrem­ent une bonne bouteille, pensent que seul l’interdit peut canaliser les excès des catégories les plus modestes, à leurs yeux par essence irresponsa­bles. Or, comme dans le domaine des idées politiques et comme le relève le chirurgien et vigneron bordelais Jean Saric dans l’entretien qu’il nous accorde, il devient évident que ce discours d’interdit généralist­e et monolithiq­ue, qui s’applique sans nuance à tous les âges, à toutes les façons de boire et à tous les types d’alcool, n’est plus audible par la population.

Sans doute Emmanuel Macron l’a-t-il senti lorsqu’à propos du vin il reprend à son compte la formule de Georges Pompidou : « N’emmerdez pas les Français » . Sans doute juge-t-il aussi que le poids économique et social du vin mérite d’être défendu plus activement. Pourquoi un pays dont la dette publique flirte avec le pic des 100 % de PIB renierait-il une activité qui emploie plus de 400 000 personnes et rapporte près de 10 milliards d’euros par an à la balance extérieure ?

Nous distinguon­s donc Emmanuel Macron pour la mesure et le bon sens qu’il oppose aux ligues prohibitio­nnistes stationnée­s dans les antichambr­es du ministère de la Santé, mais aussi pour l’engager à tenir bon. À l’heure où nous bouclons ce numéro, le plan gouverneme­ntal de lutte contre les conduites addictives (plan Mildeca) n’a pas encore été rendu public. Mais on le sait, il est déjà question d’augmenter la taille du logo “femmes enceintes” sur les étiquettes de nos bouteilles de vin et de durcir la fiscalité sur les vins… Comme le prouvent la diversité, l’enthousias­me et l’énergie des personnali­tés distinguée­s dans notre palmarès des 200, le vin français mérite beaucoup mieux que ça.

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DENIS SAVEROT directeur de la rédaction

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