La Revue du Vin de France

La renaissanc­e d’un vignoble qui bouscule la Toscane

Le Chianti Classico représente le Chianti originel de 1716, situé au coeur du vignoble actuel du Chianti, classé au début du XXe siècle. On y découvre une facette passionnan­te de l’histoire du vin italien.

- Par Sophie de Salettes

La Toscane fait rêver les esthètes du monde entier. Le Chianti, tous les amoureux de vin et de gastronomi­e. Pour autant, le Chianti (1) ne s’assoit pas sur ses lauriers. Il conduit même une révolution lente depuis les années 60.

À cette époque, le vignoble du Chianti est encore une terre de métayage et de polycultur­e, et les vignes sont loin de dominer le paysage. La majorité des vins rouges sont légers, acides, le cépage sangiovese est le plus souvent assemblé avec du trebbiano (ugni blanc) jusqu’à un tiers et “amélioré” par des vins du sud du pays. La crise a vu la jeunesse déserter la campagne et de nombreuses propriétés vendues. Mais à la fin des années 60, l’économie repart. Les subvention­s européenne­s stimulent la restructur­ation du vignoble et près de 7 000 hectares sont plantés. Le système des appellatio­ns d’origine contrôlée italiennes voit le jour, puis la DOC (Denominazi­one di Origine Controllat­a) Chianti.

Grâce à leur travail de recherche et d’innovation, les domaines les plus vertueux commencent à construire un Chianti viticole de haut vol, qui bouscule ou devance la réglementa­tion des appellatio­ns d’origine.

Le virage “super toscan”

En 1975, la naissance du cru Tignanello (Marchesi Antinori) marque une étape importante. C’est le premier sangiovese élevé en fûts, le premier vin du Chianti

assemblé à des variétés exogènes (20 % de cabernet) et l’un des premiers à ne pas contenir de raisins blancs. Un vin hors catégorie alors classé “super toscan”.

Car il s’agissait bien là pour Piero Antinori de donner naissance à un grand vin du Chianti. Or, il était trop tôt pour récolter le fruit du travail agronomiqu­e engagé et donc pour s’appuyer entièremen­t sur le sangiovese.

« À la fin des années 70, la sélection clonale du sangiovese n’était pas qualitativ­e, les densités de plantation étaient trop faibles, les cépages bordelais ont donc été très utiles pour améliorer les vins, raconte Filippo Mazzei (Marchesi Mazzei). Aujourd’hui, le sangiovese répond à nos attentes ! Cela explique par exemple pourquoi, de 1995 à 2010, la part de sangiovese dans notre vin Concerto n’a cessé de croître (80 % dans le 2015). » Pour autant, Filippo Mazzei tient à sa liberté : « Je ne veux pas de recette imposée, je veux pouvoir conti

nuer à créer » . Il tient notamment au merlot de Siepi, vendangé en même temps que le sangiovese du même cru. Il tient aussi à y enrichir l’encépageme­nt avec bientôt un hectare de malvasia nera et un autre de colorino, plus en altitude.

Bousculer les habitudes

Pour Paolo De Marchi (Isole e Olena), l’assemblage fait partie intégrante de l’histoire du Chianti. Il est néanmoins à l’origine de l’un des premiers vins modernes 100 % sangiovese ( in purezza), l’aboutissem­ent d’un long parcours. Dès sa deuxième vendange, en 1977, Paolo De Marchi bouscule les habitudes locales en excluant les raisins blancs et les vins du Sud. Il sélectionn­e ses meilleurs pieds de sangiovese et démarre des élevages en fûts de chêne et de châtaignie­r. Puis, à partir de 1987, il remplace le matériel végétal trop productif. Il choisit d’équilibrer le

au-delà des vins 100 % sangiovese, l’assemblage fait partie intégrante de l’histoire du chianti.

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Depuis 1993, Francesco Ricasoli étudie et replante avec passion les parcelles du Castello di Brolio, le plus grand vignoble de l’appellatio­n.
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