CHÂTEAU CAMUS 1985 Un souvenir de l’extrême sud bordelais
Le Château Camus n’est pas le plus connu des vins de Graves. Je l’ai moi-même découvert à la table d’un ami langonnais, intime du vigneron. Ce dernier, Jean-Luc Larriaut, disparu il y a quelques années, avait repris le domaine familial sans que la conduite d’une exploitation viticole soit une vocation.
Peut-être faisait-il un vin à contrecoeur, je ne sais, il le faisait certainement à contre-courant : peu extrait, tannique pourtant, mince, sans aucune marque d’élevage, avec une prédominance du cabernet-sauvignon et cette matrice chlorophyllienne que l’on appelle aujourd’hui “végétal noble” après l’avoir vouée aux gémonies pendant des années. Des vins qui, dans les millésimes de belle maturité, ont admirablement vieilli, sans rides, dégageant la persévérance du fruit et la distinction du sol. Tel ce 1985 goûté à deux reprises, truffé, svelte, vif même, évolué mais encore très net dans ses contours et ses parfums. Indéniablement racé, ce vin auquel le temps a donné raison n’a rien à envier aux crus de l’appellation PessacLéognan et montre tout le potentiel du sud de la région des Graves qui possède de magnifiques croupes graveleuses (allez faire un tour du côté de Saint-Pierre-de-Mons…).
Il m’est agréable, en des temps qui sont difficiles pour les appellations moins célébrées de Bordeaux,desaluerlamémoired’unvigneron modeste et incompris dont les vins, trente ans après, montrent encore ce qui pourrait être la voie à suivre pour cette région déjà plus gasconne que véritablement bordelaise, riche en terroirs méconnus. P. Ci