La Revue du Vin de France

Le style si particulie­r de Pascal Delbeck

CHÂTEAU AUSONE 1982

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Ce sont les derniers millésimes de Pascal Delbeck, avant qu’Alain Vauthier ne reprenne les manettes de ce cru historique, en lui imprimant un virage stylistiqu­e davantage tourné vers l’air du temps. Pendant longtemps, un conflit a opposé les familles copropriét­aires, mais Pascal n’a jamais dévié d’un iota dans son respect de ce terroir magique, à peine 6,5 hectares sur la côte calcaire de SaintÉmili­on, avec une philosophi­e du naturel et du millésime, la recherche du point de maturité optimale, en évitant les surmaturat­ions.

Ausone est un cru taillé pour des gardes éternelles, une célèbre dégustatio­n de 1988 est remontée jusqu’au XIXe siècle, avec d’étonnantes révélation­s comme un 1831 encore vivant ou un 1945 qui faisait figure de jeune homme ! Lorsqu’on dit qu’un vin s’étoffe avec l’âge, Ausone en est l’exemple le plus éclatant : il commençait sa carrière un peu fluet, structuré sans excès, charnu mais sans lourdeur, il pouvait être dédaigné dans les dégustatio­ns à l’aveugle à une époque où quelques haltérophi­les tenaient le haut du pavé.

Dans la verticale proposée à l’occasion de ma rubrique “Vie de Château” en 1992, c’est le 1982 qui m’avait ébloui, avec une complexité inouïe, faite de fruits rôtis, épices et bois exotiques, avec une bouche riche et suave, une richesse tannique égayée par une fraîcheur tonique, une finale d’anthologie tant elle était équilibrée, le vin n’était pourtant pas encore à son apogée. Plus tard, en recevant mon co-auteur Hubert Monteilhet, j’ai servi Ausone 1985 et 1986 sur des bécasses rôties. Si le 1986 épousait le côté saignant du volatile, le 1985 se mariait avec la “rôtie”, entrailles et foie gras mixés, sorte de toast magique à la fois canaille et raffiné. Il est hélas aussi difficile de se procurer des bécasses que des bouteilles d’Ausone ! P. C.

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