CHÂTEAUDUCHAMPS DES TREILLES, VIN PASSION 2016 Je veux défendre ce type de blanc à l’ancienne
Je trouve magique le duo sémillon-sauvignon, parfois complété de la rare muscadelle, quand les raisins sont mûrs et les bouteilles assagies par quelques années de garde. Loin des interprétations thiolées, aux acidités vertes et aux finales bloquées que je goûte peu, cet assemblage n’est malheureusement pas très en vogue et peu compris. Je me trouvais ainsi récemment à un séminaire international de sommeliers sur les blancs de Bordeaux quand fut dégustée, au milieu d’une série de vins creux aux notes artificielles de levures aromatiques, une des références qui me suit dans tous mes restaurants, le Vin Passion du château du Champs des Treilles, ce jour-là dans le millésime 2016. Produit sur les argilo-calcaires de Sainte-Foy par Corinne et Jean-Michel Comme, adeptes précoces de la biodynamiedansleBordelais,c’estunvindans lequel richesse et tension se répondent avec des notes d’oxydo-réduction complexes de pâte d’amande, fleur de pêcher, safran, zeste d’orange, rehaussées de pointes fumées. Une bouteille de gastronomie, au prix dérisoire.
Le vin était délicieux. Il provoqua pourtant une levée de boucliers : pas de fraîcheur, des notes évoluées, trop lourd, il ne correspondait pas aux canons du bordeaux blanc. J’en fus si effarée que je pris le micro et me lançai dans une défense de cette expression unique d’assemblage historique, vinifiée à l’ancienne, sans maquillage, loin des vins anémiques, réducteurs et impersonnels. Plus que jamais, je compris ce jour-là la nécessité de défendre la dégustation comme éducation à la géographie culturelle du terroir et à la complexité du goût vivant. P. L.
Castillon-Côtes de Bordeaux