Le très grand froid peut-il protéger la vigne ?
Des chercheurs l’assurent : baigner des microboutures de vigne à -196° C élimine les risques de virose. Une découverte capitale.
Alors que le vignoble méditerranéen est soumis à des épisodes de fortes chaleurs, la vigne du futur s’offre une thérapie à - 196° C. Depuis trois ans, des chercheurs de Montpellier expérimentent la cryoconservation, une technique qui expose les cellules à des froids extrêmes, pour soigner la vigne.
Utilisée pour la conservation à long terme, cette technique assurerait plusieurs dizaines d’années de vie au matériel végétal plongé dans l’azote liquide. Mais une seule heure dans ce bain de jouvence suffirait pour éradiquer les viroses. « Nous avons montré dans nos conditions de laboratoire l’efficacité de la cryothérapie pour éliminer les virus du courtnoué, de l’enroulement, à partir de plantes mères infectées » , révèle Philippe Chatelet.
LEFROID,ANTIDOTEÀLAMALADIE
Chercheur à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentationetl’environnement(Inrae),Philippe Chatelet s’apprête à étendre les tests sur un panel de 279 cépages de la collection ampélographique de Vassal, dans l’Hérault. « Les plantes mères seront assainies cet automne puis les résultats validés par tests PCR » , annonce-t-il.
Cettetechniquen’estpasnouvelle. «La première publication sur la cryothérapie de la vigne date de 2003 » , reconnaît cet expert qui souhaite généraliser son application, plus facile à mettre en oeuvre que d’autres techniques d’assainissement.
Confrontéàunrisquemassifdedisparition de la biodiversité végétale, l’Inrae, gestionnaire de plusieurs collections au champ, mise à présent sur la science du froid pour conserver dans des cryobanquessonpatrimoine.Ledomainede Vassal qui détient la plus grande collection mondiale de ressources génétiques de la vigne va bénéficier de ce « double de sécurité » dans le plateau cryoconservation d’Arcad, un pôle interinstitutionnel pour la communauté scientifique prochainement inauguré à Montpellier.
« Deux tanks d’une capacité de 6 000 cryotubes pourraient recevoir les 2 700 accessions de la collection » , précise Philippe Chatelet, coresponsable du futur plateau. L’enjeu est colossal. La cryothérapie permettrait d’assainir ce précieux matériel végétal, dont les deux tiers des accessions sont virosées.