Comment le collectionneur Michel Chasseuil a récupéré les vins de Nicolas II
Que sont devenus les légendaires flacons du tsar Nicolas II ? Un Français en a récupéré 17, frappés du sceau impérial, exfiltrés au fil d’une dizaine de voyages à Massandra entre 1997 et 2012. Ce particulier culotté et visionnaire, c’est le collectionneur charentais Michel Chasseuil.
Flash-back. À la chute du mur de Berlin en 1989, l’URSS se disloque. En Ukraine, la cave de Massandra ne peut plus payer les salaires. Le directeur, Nikolaï Boïko, fait sortir secrètement quelques centaines de caisses pour les vendre à l’Ouest et récupérer des fonds. Le 2 avril 1990, des trésors de Massandra sont dispersés à Londres, chez Sotheby’s.
À La Chapelle-Bâton, dans les Deux-Sèvres, Michel Chasseuil découvre cette vente retentissante dans les journaux. Il demande un visa pour Massandra à l’ambassade d’Ukraine. Échec. Puis, il apprend que le président Chirac et l’Office International du Vin (OIV) doivent recevoir le professeur Sergueï Djeniev, directeur de l’Institut du vin Magarach en Crimée, conservatoire de cépages anciens cousin de Massandra. Via l’intendant de l’Élysée qu’il connaît, Chasseuil invite le professeur Djeniev en Charente. Chez lui, le Français ouvre un Pétrus pour son invité, qui en retour sort de sa vieille sacoche en cuir un millésime 1924 de Massandra, l’année de la mort de Lénine ! En 1997, Djeniev convie à son tour Chasseuil en Crimée, qui repart avec sept bouteilles de Massandra. Devenu l’ami du directeur Boïko, l’infatigable collectionneur retournera chaque année à Massandra, repartant chaque fois avec une bouteille de la collection du tsar monnayée autour de 1 000 dollars, toujours en espèces. C’est ainsi qu’il possède aujourd’hui un Lacrima Christi 1894, année de construction de la cave de Massandra, ainsi que des rares muscats blancs et rosés, marsala, bastardo du XIXe siècle, sans oublier un iconique millésime 1837 dit “Pouchkine”. Denis Saverot