La Revue du Vin de France

Les actus du vin

Inquiets de la dégénéresc­ence du vignoble, 123 vignerons de la Bourgogne et du Beaujolais se mobilisent pour permettre à leurs plants de retrouver de la diversité variétale. Ils se sont réunis au sein du Gest pour développer des pinots noirs qualitatif­s.

- Idelette Fritsch

Bourgogne et Beaujolais s’unissent contre la dégénéresc­ence du vignoble Le manga Les Gouttes de Dieu adapté en série télévisée L’américain Winebid débarque dans les ventes aux enchères en France Les Affiches : un “éditeur de vins” dans le marché de la vente en ligne Championna­t de France de dégustatio­n : les Belges décrochent le titre Madiran : Alain Brumont au secours des poules de Bigorre

Guide des meilleurs vins de France : la 27e édition sort en librairie Champagne : Bernard Arnault part en guerre contre Vladimir Poutine

En vogue chez les vignerons, la sélection massale pourrait-elle remettre en cause le modèle productivi­ste de la pépinière française, principal fournisseu­r des plants de vignes greffés en France (235 millions en 2017, dont 96 % de clones) ? C’est en tout cas l’ambition affichée par le Gest, le groupement d’études et de suivi des terroirs : cette associatio­n regroupe 123 vignerons de Bourgogne et du Beaujolais bien décidés à contrôler la production de leurs plants de pinots noirs et de gamays, en imposant la sélection massale dans les pépinières. En partenaria­t avec le centre technique Sicavac à Sancerre, ils viennent de déposer à l’Inpi deux marques pour leurs sélections pinot noir et gamay de Gest-Ceps Sicavac.

FABRICATIO­N ARTISANALE

Mortalité, érosion génétique du matériel végétal, greffés-soudés de mauvaise qualité… Nombreux sont les motifs conduisant les domaines bourguigno­ns à se détourner des plants clonés industriel­s et à adopter la sélection massale. Cette fabricatio­n artisanale, longue et coûteuse, consiste à identifier sur une parcelle des pieds très qualitatif­s, à prélever les sarments, à écarter les bois porteurs de maladies, à confier les greffons à un pépiniéris­te de confiance qui les multiplier­a et greffera sur portegreff­es américains. Pour Thibault LigerBelai­r, engagé dans cette démarche dès 2005, les plants ainsi obtenus retrouvent une diversité intra-variétale mise à mal, depuis les années 1960, par la sélection clonale : « Mettez 100 personnes identiques dans une salle, cela devient très vite emmerdant. Avec la sélection clonale, vous vous retrouvere­z très vite avec un vin au fruit emmerdant ! ».

L’orfèvre du pinot noir de la Côte de Nuits connaît son sujet : sur les 48 clones de ce cépage homologués en France, seuls trois ou quatre sont greffés par les pépiniéris­tes. D’où le projet du Gest, l’associatio­n qu’il préside. « Nous voulons rendre la sélection massale accessible à tous nos adhérents en leur assurant une production de greffons qualitatif­s, contrôlés par un cahier des charges et une charte de suivi de nos pépiniéris­tes partenaire­s », explique Agnès Mathé, technicien­ne du Gest. Pour y parvenir, le Gest a signé en 2020 ●● ●

●● ● un partenaria­t avec un pionnier en la matière, le Sicavac, qui a ouvert la voie dès 2017 dans le vignoble du CentreLoir­e avec le sauvignon blanc. « Nous étions confrontés à une mortalité inquiétant­e de nos vignes. Pour en comprendre les causes, en 2014, nous avons fait un tour de France des pépiniéris­tes », retrace Olivier Luneau, vigneron à Menetou-Salon et directeur adjoint de la structure.

Le tableau noir de la pépinière française (hormones au greffages, herbicides, sélection de greffons de “second choix”, etc.) a incité cette structure à créer sa propre pépinière, Ceps Sicavac, en imposant à ses partenaire­s pépiniéris­tes (Mercier, Mary, Hebinger, Gibault) un cahier des charges et une charte de suivi : emploi de porte-greffes palissés pour garantir la qualité sanitaire des bois, interdicti­on des herbicides, fertilisat­ion conforme aux règles de l’agricultur­e bio, contrôles annuels dans les pépinières lors des phases clés de production­s des plants, comme le tri des greffons (en donnant la priorité aux plants dont les talons présentent un bon système racinaire)… Les contrainte­s sont nombreuses. Un modèle aujourd’hui adopté par les Bourguigno­ns, qui vont imposer le même parcours technique à leurs partenaire­s (les quatre historique­s, auquels s’ajoutent les bourguigno­ns Guillaume et Néau).

LES USAGES DOIVENT CHANGER

Pour établir ses premières lignées de pinots noirs à haute diversité variétale, le Gest a prospecté, « du Mâconnais à la Côte de Nuits, sept domaines emblématiq­ues qui pratiquent la sélection massale et identifié 220 pinots noirs qualitatif­s. Les gamays suivront en 2022 », indique Agnès Mathé.

Au printemps, ces sarments seront surgreffés à Sancerre, puis multipliés par les pépiniéris­tes en vue de leur commercial­isation en 2025. Et si la pépinière française est invitée à rentrer dans le rang, les vignerons aussi. « On ne peut pas acheter ses plants de vignes comme des lots de cartons, les usages doivent changer », insiste Olivier Luneau. Les adhérents du Gest devront, pour accéder à ces plants très qualitatif­s, s’engager à les commander dix-huit mois à l’avance, avec un prix fixé à 2,50 euros par plant certifié.

 ?? ?? Après nous avoir régalé sur les terrains verts, Éric Carrière illumine nos verres. Et joue collectif, toujours.
Après nous avoir régalé sur les terrains verts, Éric Carrière illumine nos verres. Et joue collectif, toujours.
 ?? ?? Thibault Liger-Belair, à l’initiative de ce projet, est à la tête de l’associatio­n Gest.
Thibault Liger-Belair, à l’initiative de ce projet, est à la tête de l’associatio­n Gest.
 ?? ?? Le principe consiste à récupérer des sarments sur des pieds de pinot noir très qualitatif­s.
Le principe consiste à récupérer des sarments sur des pieds de pinot noir très qualitatif­s.
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France