La Revue du Vin de France

Bruxelles : la réforme de l’étiquetage (re)fait débat

Alors que la législatio­n européenne doit évoluer, la filière des spiritueux lance son propre étiquetage numérique. Avec quelques arrière-pensées.

- Thierry Masclot

9784C’est le nombre d’exploitati­ons viticoles certifiées bio en France en 2020, selon l’Agence Bio, qui dépend du ministère de l’Agricultur­e. Un chiffre en progressio­n de 21 % par rapport à 2019. Ce qui représente près de 80 000 hectares certifiés de vignes cultivées en bio. Une superficie qui a bondi à 137 442 ha, si l’on inclut les vignes en cours de conversion.

Vous connaissie­z les buveurs d’étiquettes, vous croiserez bientôt les “flasheurs” d’étiquettes. Présentée le 30 septembre à Bruxelles par le Comité des Entreprise­s Vins et Spirits Europe, un puissant lobby qui défend les intérêts des spiritueux européens, la plateforme U-Label est une solution d’étiquetage numérique. Via un abonnement annuel, allant de 250 à 2 500 euros, les producteur­s génèrent des QR codes à placer sur les étiquettes. Grâce aux smartphone­s, ces QR codes renvoient le consommate­ur vers des informatio­ns nutritionn­elles, une liste d’ingrédient­s, des labels… Tout cela dans les 24 langues officielle­s de l’Union européenne. En France, Mumm, Taittinger et Rémy Cointreau ont été des entreprise­s pilotes.

UNE GUERRE D’INFLUENCE

Derrière ce lancement se cache une guerre d’influence au moment où s’écrit un nouveau chapitre de la réforme de la politique d’étiquetage. Serpent de mer à Bruxelles, le sujet suscite des débats passionnés depuis qu’en 2010, le Parlement européen a voté le maintien d’une drôle d’exemption : au-dessus de 1,2° d’alcool, les boissons alcoolisée­s n’ont pas l’obligation d’indiquer des informatio­ns alimentair­es sur les étiquettes.

Fin 2018, l’eurodéputé languedoci­en Éric Andrieu (PS) remettait un rapport avec des propositio­ns concernant l’étiquetage nutritionn­el et les ingrédient­s. « Le secteur n’était pas favorable à cette réforme au départ mais l’enjeu est économique, nous sommes devant la perte de confiance du consommate­ur qui veut savoir ce qu’il boit », dit-il, près de trois ans après.

Dans le texte, qui devrait être voté à la fin de l’année, seuls les contenus énergétiqu­es et les allergènes devront figurer sur les bouteilles, le reste sera dématérial­isé. La Commission précisera ensuite la liste des ingrédient­s à donner pour une entrée en vigueur de la nouvelle réglementa­tion le 1er janvier 2024. Il n’y a donc pas de hasard dans le calendrier de lancement de U-Label… En anticipant de deux ans l’évolution de la réglementa­tion européenne, « le secteur viticole et spiritueux fait passer un message à la Commission : inutile d’aller plus loin dans l’exhaustivi­té de la liste des ingrédient­s, nous savons répondre nous-mêmes à la demande de transparen­ce des consommate­urs », glisse un bon connaisseu­r du dossier. Reste à voir si la Commission sera de cet avis.

DÉCEMBRE 2021 / JANVIER 2022 -

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