TON BUSINESS PLAN TU PRÉVOIRAS
« Acheter des hectares de vignes quinze fois plus cher pour un prix de revente des bouteilles à peine deux fois plus cher est “inamortissable”. Il faut aussi tenir compte de la bonne tenue du vignoble et du réseau de commercialisation en place ».
En Côtes de Bourg, les deux compères trouvent « une appellation assez petite qui permet de se différencier si l’on travaille bien et la possibilité de s’étendre en superficie grâce à un foncier libérable, à prix raisonnable ». Le plus de château Bujan ? Un réseau de vente opérationnel (100 000 bouteilles commercialisées en grande distribution, à l’export et dans le réseau Cafés, hôtels, restaurants) qui va leur permettre de « financer l’investissement foncier de départ ».
Dans le cadre d’une création de domaine, le raisonnement est un peu différent. « Il faut avoir un matelas financier pour les trois premières années : une année pour la production de raisin, une année pour la production du vin, voire deux si l’on est plus ambitieux sur la qualité, et encore une année pour lancer son réseau de commercialisation », détaille Olivier Faucon, vigneron au Mas Combarèla, en Languedoc (Terrasses du Larzac). « Il ne faut jamais sous-estimer la longueur des cycles en viticulture. Après deux ans de production, quand la commercialisation arrive, vous êtes un inconnu parmi des milliers de vignerons. Sans réseau de vente en place, si vous êtes excellent, cela peut prendre cinq à dix ans, il faut avoir la capacité de tenir financièrement », surenchérit de son côté Michel Lachat, directeur départemental Gironde à la Safer NouvelleAquitaine.
Pour vous aider à réaliser vos prévisions en matière de budget, de coûts de production ou pour mettre au point une grille tarifaire, tournez-vous vers les Chambres d’agriculture. Elles seront vos interlocutrices privilégiées. Car avant de se lancer, il faut entamer une série d’études et d’analyses (business plan, budget prévisionnel, étude de marché…) qui vous permettront de prévoir le chiffre d’affaires de votre exploitation pour les cinq premières années. Si vous avez suivi un BTSA Viti-oeno, ces questions ont été abordées. Mais même avec ce socle de connaissances, parvenir à prévoir quel sera le coût global d’une installation (achat ou location de vignes, de matériel viticole, de bâtiments, de machines, de fûts, de bouteilles, de produits, d’étiquettes, création d’un site internet…), déterminer à quel prix seront vendus vos flacons, choisir le réseau de distribution pour les écouler… se révélera particulièrement ardu.
Pour vous rendre la tâche plus facile, après le BTSA, vous pouvez compléter votre cursus par une formation en gestion et management des entreprises viticoles type licence, bachelor ou master. De leur côté, les Chambres d’agriculture prodiguent gratuitement (il faut payer pour un accompagnement poussé) des conseils utiles, tandis qu’un réseau comme Cerfrance (cerfrancegironde.fr) peut vous accompagner sur
toute une série de points allant de la création d’entreprise à la comptabilité en passant par les aspects juridiques… moyennant finances, bien sûr.
Des documents gratuits et téléchargeables sur le Net sont aussi disponibles. Notamment les “référentiels économiques du vigneron” 2002, 2009, 2012, 2016, 2018, 2019 et 2021 publiés par la Chambre d’agriculture de Gironde. Le document présente les coûts de production de quatre exploitations “type” en AOP Bordeaux, qui travaillent soit en conventionnel, soit en zéro herbicide, soit en bio. D’autres Chambres d’agriculture, comme celle des Pays de la-Loire et du Centre-Val de Loire, ont fait le même travail de prospective.
Attention enfin à votre positionnement tarifaire, dont dépendra la réussite ou non de votre entreprise. Placer le curseur trop bas vous permettra peut-être de vendre des bouteilles, mais cela réduira vos marges et donc vos rentrées d’argent et votre capacité à rembourser vos crédits ou à générer un salaire. Le placer trop haut, c’est courir le risque de ne pas vendre assez et, malgré une marge conséquente, de rencontrer les mêmes difficultés. choix. Son parcours débute en 2015 avec la Chambre d’agriculture du Rhône. Il reprend en fermage huit hectares de vignes grâce au Répertoire départ installation, un dispositif national qui permet d’anticiper les futures cessions. « J’ai monté mon dossier en 2015, le projet a abouti avec une contractualisation le 1er janvier 2019 », relate-t-il.
Il rempile au sein de cette administration pour obtenir la Dotation jeune agriculteur, une aide conditionnée par la création d’un plan d’entreprise sur quatre ans et « des formations obligatoires pré-installation avec des juristes (pour une exploration des différents modèles d’entreprise), des assureurs, etc., énumère-t-il. À mixer avec les Chambres de commerce et d’industrie, qui organisent régulièrement des journées installations, ce qui permet de gagner du temps ». Une aide précieuse lorsque l’on fait ses premiers pas dans le monde agricole et alors que les démarches sont nombreuses à réaliser.
Une fois l’activité en place, Cerfrance, un réseau associatif de conseil et d’expertise comptable en France, est un outil d’encadrement fiable. « C’est un service que je préfère payer plutôt que de faire des erreurs, ils sont spécialisés en agriculture et présents dans toutes les zones rurales de France », précise Simon Pérot. Ne pas hésiter non plus à contacter les Douanes : « Très accessibles au téléphone, elles donnent des informations sur la gestion des stocks, la comptabilité matière, l’établissement des documents d’accompagnement export, ce qui évite bien des erreurs de débutants ».
Son constat ? Trop d’organismes nuit à l’information. Pour ses raisons, Simon Pérot projette d’éditer en 2022 un guide pratique de l’installation, une « boîte à outils qui centraliserait les structures d’accompagnement et les dispositifs d’aide existants, avec des témoignages de vignerons qui ont passé toutes les étapes ». Un ouvrage que vont s’arracher les futurs néo-vignerons…
FÉVRIER 2022 -