Les actus du vin
Les collectifs de vigneronnes fleurissent et font de plus en plus parler d’eux. Plus qu’un impact commercial, c’est d’abord une écoute et une entraide dans la gestion des tracas quotidiens que recherchent les adhérentes.
• Clubs de vigneronnes : solidarité et échanges avant tout
• Baux-de-Provence, Calvi… : ces appellations qui visent le 100 % bio
• La vigne se réinstalle dans le Cantal, des vignerons motivés et un sacré défi
• De la Corse à Cahors, le retour de la complantation
• Saga zimbabwéenne au Championnat du monde de La RVF
• Champagne : Ruinart et le Land Art, avec l’artiste Nils-Udo
Les Dames de Coeur, les diVINes, les Fa’Bulleuses, les Intrépides… Tous ces clubs ont un point commun : ils fédèrent des vigneronnes dans un collectif. Il en existe dans toutes les grandes régions viticoles françaises. Françoise Ollier-Taillefer, la présidente de Vinifilles, qui réunit 21 vigneronnes d’Occitanie, se souvient : « En 2009, nous avons voulu créer un réseau d’entraide de vigneronnes qui se trouvaient un peu seules dans un milieu masculin, parfois machiste ».
La création du premier collectif, les Aliénor du Vin de Bordeaux, en 1994, correspond il est vrai aux prémices de la féminisation du secteur. À partir des années 2000, les femmes sont plus nombreuses à prendre la tête d’exploitations viticoles, sans pour autant se sentir accompagnées et représentées par les organisations syndicales et interprofessions. D’où l’essor de ces collectifs.
L’intérêt numéro un, c’est la solidarité. Les femmes aussi sont plus fortes ensemble que toutes seules. « Lorsque Mas Thélème, à Pic Saint-Loup, a été grêlé à 100 % il y a cinq ans, raconte Françoise Ollier-Taillefer, nous avons toutes donné du vin pour que le domaine passe l’année. »
GROUPE WHATSAPP
Comment ça marche au quotidien ? Le fil d’Ariane de la plupart de ces collectifs est un groupe WhatsApp. La recherche d’un nouveau fournisseur, les nouvelles normes pour exporter en Angleterre… toutes les questions y sont abordées. « Si j’avais un contrôle des douanes, je ne saurais pas à quel vigneron en parler dans mon village. Au sein des diVINes d’Alsace, je sais tout de suite. Rien n’est secret, c’est très rassurant », explique la présidente, Mélanie Pfister.
Françoise Antech anime le collectif Les Quilles du Sud, émanation de Vinifilles. Son truc, c’est la mutualisation des coûts de com et de relations presse. Elle commente : « Entre elles, les filles disent ce qu’elles ne savent pas faire, les hommes disent plutôt ce qu’ils savent faire ». Anaïs Ricome, du domaine La Croix Gratiot, à Montagnac, membre des Intrépides, autre émanation de Vinifilles, confirme : « L’idée est d’échanger, en particulier sur la biodynamie. Les associations existantes nous semblaient parfois un peu trop extrémistes. On n’a pas besoin d’avoir un béret, une barbe pour s’intéresser à ces questions ! ».
FAIRE STAND COMMUN
Plusieurs de ces collectifs pratiquent la mutualisation des coûts et des moyens de manière à faire stand commun, par exemple lors de salons. En Alsace, les diVINes mutualisent les achats, notamment les cartons spéciaux pour développer la vente à distance comme ●● ●
●● ● ce fut le cas lors de la pandémie. Des fichiers clients partagés incitent les cavistes à faire des achats groupés.
Plus au sud, Femmes Vignes Rhône, fondées en 2004, a créé un “Club des partenaires” qui réunit une quinzaine de fournisseurs adhérents. Cela rapporte environ 10 000 euros par an à l’association. La contrepartie ? La possibilité de présenter de nouveaux produits et des invitations à des événements, un autre objectif de ces collectifs. Les diVINes organisent ainsi plusieurs soirées Wine and the City en début d’été. En 2023, Femmes Vignes Rhône organiseront un rallye de voitures anciennes dans la Vallée du Rhône.
PARI RÉUSSI
Mettons les pieds dans le plat : ces collectifs ont-ils un impact commercial ? Difficile à chiffrer mais plusieurs représentantes reconnaissent que cavistes et importateurs sont sensibles à leur discours. « MeToo est passé par là, c’est moins négatif d’être féministe aujourd’hui, c’est plus mainstream. Les anciennes avaient un côté plus dur », glisse Mélanie Pfister.
Françoise Roumieux (Vignobles Mayard), présidente de Femmes Vignes Rhône, ajoute : « Nous voulions faire de la pédagogie sur la place des femmes dans le monde viticole et donner confiance aux femmes vigneronnes ». Pari réussi en Alsace : seulement 10 % des responsables de la gestion locale de Grands crus sont des femmes, mais elles font toutes parties des diVINes.
Tous ces collectifs sont réunis au sein du Cercle Femmes de Vins. Créé en 2009, il rend transversales certaines actions et est présidé par l’Alsacienne Mélanie Pfister. Ce cercle fait lui-même partie d’un réseau mondial créé sous l’impulsion des Italiennes de Le Donne del Vino. Il se réunit cette année à Milan en novembre lors du SIMEI (Salon international du matériel pour oenologie et embouteillage).