La Revue du Vin de France

Domaine Jean-Paul et Benoît Droin

Une école des terroirs

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À Chablis, dans la lignée d’une tradition longue de trois siècles qui met en relief les qualités de chaque terroir, Benoît Droin contribue à faire évoluer le domaine familial. Le vigneron est en train d’équiper ses vignes de fils chauffants pour lutter contre le gel. Reportage et dégustatio­n de Pierre Casamayor, photos : Anne-Emmanuelle Thion

Avec treize génération­s de vignerons, la famille Droin fait partie intégrante du paysage chablisien ! Charles Droin possédait de la vigne dès 1735, à une époque où les climats étaient déjà identifiés. Suit alors une longue lignée de vignerons qui ont travaillé sur les nouvelles acquisitio­ns réalisées pendant la Révolution. Au début du XXe siècle, Louis

Droin cofonde l’Union des vignerons de

Chablis et initie la vente des vins en bouteilles. Puis Marcel crée l’exposition des vins de l’Yonne et devient membre de l’Inao. Jean-Paul construit un premier chai en 1981, puis des caves en centre-ville et continue la replantati­on du vignoble familial. Il passe la main à son fils Benoît en 2014. Après avoir rejoint l’exploitati­on en 1999, Benoît finit le nouveau chai au pied de la colline des Grands crus et développe la production du domaine. Il oriente le style vers des vins moins boisés en diversifia­nt ses tonneliers, jusqu’à panacher des douelles de diverses provenance­s, avec à peine 5 % de fûts neufs.

Le vignoble s’étend désormais sur 26 hectares. Il offre une palette de terroirs balayant toutes les appellatio­ns : PetitChabl­is, Chablis, neuf Premiers crus et cinq Grands crus. Les sols sont travaillés sur 10 cm, avec des interceps, sous le rang, en trois passages. On peut aussi y utiliser un défanant. Les vignes de chardonnay sont conduites en guyot simple, avec 6 à 8 yeux par pied, avec une densité de 6 000 pieds/ha – des parcelles montent même jusqu’à 10 000 pieds/ ha, afin de mieux gérer la mortalité des ceps due à l’esca. Les plus vieilles vignes datent de 1947, les replantati­ons s’effectuent en sélection massale, du compost et des sarments broyés viennent enrichir les sols. Les traitement­s penchent vers le bio, mais on garde ici une bonne dose de pragmatism­e : on ne se prive pas des armes efficaces pour remplacer le cuivre et le soufre si besoin ; une voie médiane, mi-bio mi-raisonné, à l’opposé du tout ou rien idéologiqu­e. À ce sujet Benoît Droin nous confie : « Je considère comme une hérésie écologique le fait de multiplier les traitement­s bio, avec des passages d’engins polluants trop fréquents. On ne peut se battre avec du cuivre seul en année difficile. Depuis les origines, les chroniques relatent des épisodes de gel ou de grêle qui ravagent le vignoble, ces fléaux ne sont pas nouveaux dans la Bourgogne du nord. Le gel est un problème récurrent à Chablis, on peut y perdre des récoltes entières, comme en 2021. Les méthodes de lutte ont été développée­s, avec une majorité de chaufferet­tes. Devant le coût du chauffage, le prix des bougies, l’installati­on, l’allumage et la désinstall­ation par une main-d’oeuvre onéreuse, il faut 4 à 500 chaufferet­tes par hectare, soit 5 à 6 000 € par nuit de gel. » Benoît Droin opte alors pour les fils chauffants. Une première parcelle sur Valmur a été équipée et demande un gros transforma­teur de 180 KV pour 1,5 ha : une installati­on chère mais au coût de fonctionne­ment qui demeure abordable. La facilité d’usage est sans comparaiso­n et cette méthode est adaptée aux gelées noires si fréquentes sur les hauts. À terme, le vigneron compte bien équiper d’autres parcelles particuliè­rement exposées. Mais avec la récente flambée des cours de l’électricit­é, ce modèle économique pourrait perdre de ses avantages.

DES ÉLEVAGES COURTS POUR PRÉSERVER LA FRAÎCHEUR

La vendange est mécanique, Benoît y trouve l’avantage des temps très courts entre la récolte et le pressurage. Quelques parcelles sont récoltées à la main, les raisins arrivent au chai en bennes élévatrice­s de 50 hl. Ils sont pressés en grappes entières dans deux pressoirs pneumatiqu­es avec sélection des jus. Le

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Après des études au lycée viticole de Beaune, Benoît Droin passe son diplôme d’oenologie à Dijon avant de revenir à la propriété. À chaque vin, il insuffle une précision et un caractère particulie­rs qui restituent au mieux son origine.
Benoît Droin Après des études au lycée viticole de Beaune, Benoît Droin passe son diplôme d’oenologie à Dijon avant de revenir à la propriété. À chaque vin, il insuffle une précision et un caractère particulie­rs qui restituent au mieux son origine.
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