La Revue du Vin de France

Seul comme un vigneron face à la catastroph­e sanitaire

À Cognac, le Musée d’Art et d’Histoire nous met dans la peau d’un scientifiq­ue lors de la crise du phylloxéra au XIXe siècle.

- Corinne Lefort

Grande exposition à Cognac

Alors que les effets du réchauffem­ent climatique impactent le vignoble, posant la question de sa survie et de l’évolution des cépages identitair­es pour la production des vins d’appellatio­n, l’exposition sur l’épopée humaine et scientifiq­ue du phylloxéra qui se tient au Musée d’Art et d’Histoire de Cognac (*) est plus que jamais opportune. Une initiative culturelle qui, au travers de l’histoire viticole, donne à réfléchir sur la capacité du monde viticole à s’adapter aux changement­s environnem­entaux.

CATASTROPH­E SANS PRÉCÉDENT

À la fin du XIXe siècle, la crise du phylloxéra touche l’ensemble du vignoble de l’Hexagone par la survenue d’un parasite provenant de l’est des États-Unis, arrivé malencontr­eusement dans le Gard en 1863. Cet insecte fut à l’origine d’une catastroph­e agricole sans précédent, avec pour conséquenc­e de profonds bouleverse­ments sociaux, économique­s et des actions politiques désastreus­es.

Dévastées, les vignes françaises et européenne­s ne devront leur régénéresc­ence, dans les premières décennies du XXe siècle, qu’à l’introducti­on de plants dits américains, de nouveaux portegreff­es résistant à l’insecte ravageur, adaptés aux cépages et aux sols (sur ce sujet, lire La RVF n° 664, octobre 2022).

RÉSILIENCE COLLECTIVE

À Cognac, l’exposition, admirablem­ent scénograph­iée, invite le visiteur à redécouvri­r l’un des pires moments de l’Histoire survenus notamment dans le vignoble charentais. Elle souligne également la résilience collective dont a fait preuve le monde viticole. Comment vivre après une telle épreuve ? Comment se développer et se réorganise­r après un tel traumatism­e ? Ces interrogat­ions pertinente­s interpelle­nt le monde viticole d’aujourd’hui, confronté aux épisodes successifs de sécheresse et à la raréfactio­n de l’eau. Les constats inquiétant­s amènent déjà de nombreux agronomes et viticulteu­rs à trouver des techniques alternativ­es culturales, par exemple en recherchan­t et complantan­t d’anciens cépages locaux plus aptes à résister au stress hydrique et en changeant leurs pratiques agraires.

La visite au Musée d’Art et d’Histoire ne saurait s’achever sans la découverte, en ces mêmes lieux, des très belles oeuvres d’art permanente­s installées au sein de l’hôtel particulie­r Dupuy d’Angeac construit en 1838. Tout au long de l’année, un parcours dédié à l’histoire du territoire y est proposé, présentant d’importante­s pièces d’archéologi­e issues de gisements préhistori­ques du Cognaçais, dont l’une des plus anciennes pirogues néolithiqu­es découverte­s en France.

LALIQUE, GALLÉ…

La crise du phylloxéra : comme une résonance avec les effets de l’actuel réchauffem­ent.

Le musée renferme également une collection remarquabl­e de peintures des Écoles du nord, témoignage des liens entre la Charente et les Pays-Bas, des objets d’arts décoratifs, avec notamment des créations de René Lalique et Émile Gallé, ainsi qu’un ensemble important de peintures saintongea­ises et des sculptures. Un parcours qui incite, malgré les difficiles épreuves subies par le phylloxéra, à la création et à l’audace. Une belle leçon pour les génération­s futures.

Exposition Phylloxéra, une épopée humaine et scientifiq­ue, jusqu’au 31 décembre 2022.

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