Bravo le Luxembourg !
Championnat du monde
La soirée est douce à Reims, ce 7 octobre. La maison Ayala accueille les 31 équipes en lice pour le Championnat du monde de dégustation à l’aveugle. Les festivités débutent par une dégustation de champagnes. L’atmosphère est joyeuse, les compétiteurs, toujours plus nombreux, sont heureux de se retrouver pour célébrer la dixième édition du championnat. Cette année, quatre nouvelles nations les ont rejoints : la Moldavie, le Canada, l’Écosse et le Kenya avec une équipe 100 % féminine très remarquée.
Le lendemain, place à la compétition. L’équipe belge, l’une des favorites, se montre confiante. Les clefs de cette confiance ? Une préparation rigoureuse, une solide connaissance des points forts de chacun. « On s’équilibre parfaitement », résume Nathalie Harhelier, la coach de l’équipe. Et en cas de désaccord majeur, elle ajoute avec malice : « Il nous est déjà arrivé de tirer à pile ou face ». La fortune sourit aux dégustateurs audacieux. Souvent mais pas toujours.
COURSE CONTRE LA MONTRE
Il fallait identifier à l’aveugle les douze vins du monde sélectionnés par Philippe de Cantenac, infatigable organisateur du
Les Luxembourgeois exultent, ils remportent pour la première fois le trophée mondial.
championnat de La RVF. Avec une complication supplémentaire. Toutes les dix minutes, les équipes devaient rendre leurs copies après avoir dégusté chaque vin. La réponse était ensuite dévoilée et les scores affichés instantanément sur grand écran. Une nouveauté qui a mis à rude épreuve les nerfs des dégustateurs et qui a balayé les espoirs français (18e, 83 points). « Pressés par le temps, nous avons enchaîné les mauvais arbitrages. Nous avons confondu le chenin du deuxième vin avec un chardonnay. En découvrant notre score après la dégustation des premiers vins, nous avons perdu pied et nous n’avons pas réussi à retrouver la bonne dynamique pour la suite de l’épreuve », reconnaît Pascal Bessard, dégustateur aguerri et vétéran du Championnat de France.
D’autres difficultés attendaient les compétiteurs. Dans la série des rouges, les vins n° 6 et 7 étaient tous les deux issus du même cépage, le pinot noir, mais de pays différents. « On a cru à un piège lorsque l’on a identifié deux pinots noirs d’affilée », raconte Hide Ishizuka, membre de l’équipe japonaise (25e, 71 points. Le second pinot noir, juteux et poivré, signé par le domaine alsacien Muré a dérouté de nombreuses équipes.
Le douzième et dernier vin aussi, un élégant sauternes du château de Fargues. « Il y avait déjà eu quatre vins français, on ne s’attendait pas à un cinquième », avoue, désappointée, la sommelière Julia Scavo, capitaine de l’équipe de Roumanie (7e, 115 points), qui a préféré déclarer un tokaji hongrois. Même déduction du côté des diables belges (4e, 117 points). Erreur fatale : ce choix leur coûte la deuxième place. Au prix des larmes, ces équipes retiendront qu’il faut toujours suivre son instinct de dégustateur plutôt que d’échafauder de savantes statistiques.
L’ASCENSION DU PORTUGAL
Expérimentée, persévérante, l’équipe luxembourgeoise (1ère, 139 points) a su se jouer de ces écueils et faire la différence. La consécration pour Zaiah et Hervé Amann, Guy Bosseler, Jules Hoffelt et leur coach Daniel Poos, présents chaque année depuis la création de la compétition. Ils s’imposent devant le Portugal (2e, 123 points) et l’Espagne (3e, 122 points) emmenée par un couple dynamique et passionné, l’influenceuse Marla Gonzalez et Eduard Ros, un avocat d’affaires reconverti dans la restauration. Surprise, les derniers du classement en 2021, le Portugal, se hissent sur la deuxième marche du podium.
Leur botte secrète ? « L’esprit d’équipe », répondent d’une voix les quatre dégustateurs. « Par le passé, on a eu de très bons dégustateurs mais ils imposaient aux autres leur réponse. Cette année, nous avons joué plus collectif, cela a payé », raconte Carlos Sancho.
Suivre son instinct de dégustateur plutôt que d’échafauder de savantes statistiques