Des grands bourgognes à prix doux
Bouzeron, Givry, Rully, Montagny, Mercurey… la Côte chalonnaise décline les grands pinots noirs et chardonnays. Une aubaine pour l’amateur frustré par la flambée des prix des crus de la Côte-d’Or.
Dans un contexte où les vins de Bourgogne connaissent un engouement sans précédent, avec des prix stratosphériques tout en offrant un niveau de qualité exceptionnel, la succession de récoltes faibles en volume, notamment 2021, est venue gripper cette belle ascension.
Cette bulle spéculative touche particulièrement les vins de la Côte de Nuits et de la Côte de Beaune, au grand dam des amateurs. Car si les vignerons bourguignons ont fait le plein avec le millésime 2022, cela n’a pas calmé les ardeurs des marchés. Les prix continuent à grimper et les amateurs en quête de vins abordables ont dû mal à trouver leur bonheur. Mais à l’ombre de ces deux prestigieux secteurs, quelques vignobles résistent à cette frénésie spéculative : le Mâconnais, la Côte chalonnaise, sans oublier le Chablisien.
PARFAIT ÉQUILIBRE
Notre dégustation vient donc à point nommé pour redonner du baume au coeur aux passionnés de la Bourgogne. Cette dégustation dévoile un palmarès où l’excellence du millésime 2020, chaud, avec des maturités très abouties, est très largement confirmée. Les domaines ayant géré leurs rendements à la vigne et n’ayant pas trop appuyé sur le curseur boisé nous offrent des vins proches de la perfection.
Des pépites dans les appellations Bourgogne et Bourgogne Côte chalonnaise prouvent qu’il est possible de dénicher de très beaux vins gourmands et accessibles autour de 10 euros. Une véritable aubaine pour les amateurs.
Bouzeron, petite par la taille, s’avère grande par la qualité et la précision de ses aligotés. Digestes, les 2020 flirtent avec le parfait équilibre. Montagny séduit avec des blancs infiniment minéraux, au potentiel élevé. L’effet climatique leur est bénéfique. Aptes au vieillissement, les rouges 2020 de Givry imposent leur carrure athlétique. Rully brille par la pureté de ses chardonnays. Bien élevés, ils rivalisent avec leurs voisins de la Côte-d’Or. À Mercurey, les 2020 impressionnent par leur concentration. Les rouges dominent les débats, avec parfois des accents nuitons qui montrent qu’ils possèdent l’étoffe et l’énergie des plus grands vins de Bourgogne.
En attendant l’abondant millésime 2022, tout juste vinifié, 2021 commence à être commercialisé. Les volumes sont
faibles, le gel a amputé la récolte de 28,7 % pour les rouges et de 55,8 % pour les blancs. Stylistiquement, 2021 est considéré comme une “année de vigneron”. Certains vignerons reconnaissent que ce millésime froid n’aurait pas eu le même allant si les volumes avaient été plus élevés. L’amateur devra donc rester vigilant face à la qualité hétérogène des vins. Les 2021 les plus réussis se montrent frais, de grande finesse, plus classiques et moins généreux que 2020.
MOBILISATION RECORD
Enfin, l’amateur s’étonnera de ne pas trouver dans notre dossier des pinots noirs des Côtes du Couchois. Fanés, confits, cuits, parfois oxydés, marqués par des boisés trop accentués… Aucun des onze échantillons reçus n’a malheureusement pu être retenu. Il est regrettable que les meilleurs interprètes de cette appellation régionale (33 hectares) n’aient pas répondu à notre demande.
Autres grands absents de notre dégustation : les crémants de Bourgogne. Après des pertes de récoltes abyssales en 2021, la troisième productrice de crémants en France, derrière l’Alsace et la Loire, n’a pas également pu répondre à notre appel à échantillons.
Quoi qu’il en soit, notre dégustation a réuni 350 cuvées. Un record qui témoigne de la forte mobilisation des domaines mais aussi des maisons de négoce. Saluons également le fait que 100 % des domaines du Chalonnais figurant dans le Guide des meilleurs vins de France de La RVF ont accepté de se prêter au jeu de la dégustation à l’aveugle. Bonnes dégustations !
Conditions de la dégustation
Les 350 vins présentés ont été dégustés à l’aveugle par Christian Martray en octobre 2022 au Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVB). Merci à Mathilde Patureau et Hervé Bianchi du BIVB pour l’organisation de cette dégustation.