Jean-Michel Deiss plante de la syrah en Alsace !
Incroyable mais vrai : l’iconique vigneron alsacien plantera au printemps des syrah, grenache, terret, counoise et cinsault sur un hectare du Schloessleberg, au-dessus de Westhalten, à côté de Rouffach (rien à voir avec le Schlossberg). « Le climat alsacien change, j’évolue en gardant mon identité », clame l’ardent défenseur de la complantation, cofondateur du collectif “Vignobles complantés”.
Pourquoi syrah et grenache ? Avec le réchauffement, le climat alsacien, déjà la région la plus sèche de France, se rapproche selon lui de celui de Châteauneuf-du-Pape. Et le pinot noir planté seul commence à marquer ses limites. Il a aussi pensé au mourvèdre, plus sudiste encore, mais préfère attendre. Le choix des cépages est aussi dicté par le terroir : calcaire et solaire, la colline du Schloessleberg abrite une végétation méditerranéenne.
Fidèle à ses convictions, le célèbre vigneron de Bergheim complantera syrah et grenache avec pinots noir et gris. Pratique ancienne, la complantation vise à cultiver différents cépages sur une même parcelle. À la différence de l’assemblage, les raisins de variétés différentes sont vendangés et vinifiés en même temps « pour offrir une expression des vins qui fait primer le terroir sur les cépages », aime à rappeler Jean-Michel Deiss.
Selon lui, les vignobles complantés résistent mieux aux maladies, la variété des cépages renforçant les défenses immunitaires de la vigne. La diversité constituerait aussi une assurance face aux caprices du climat. Les floraisons n’ayant pas lieu en même temps, cela limite les pertes lors d’un gel printanier par exemple. « Miser sur un seul cépage revient à parier sur un athlète unique pour toutes les épreuves des Jeux olympiques », sourit Jean-Michel Deiss.
Attention, pour le vigneron de Bergheim, la complantation ne peut être généralisée : « Elle est inutile si l’on ne travaille pas sur un haut lieu, un grand terroir », reconnaît-il. Produire un grand vin exige de vendanger au bon moment, il faut des moyens. C’est à ce prix que les différences de maturité entre les cépages deviennent complémentaires avec le vieillissement.