L’édito de François Sapy
Mais qui va bien vouloir des vieux demain ? Les derniers chiffres du chômage du département du Rhône, même s’ils présentent une relative stabilité ( le nombre de chômeurs augmente de 0,1 % en juin), me semblent, en fait, assez inquiétants. Certes, en un an, le chômage baisse de 0,8 % dans le département. Mais cette baisse masque des « poches » de chômage ultra- résistantes. Et c’est là que le bât blesse. Chez les jeunes, tout va bien. Parmi ceux qui cherchent un boulot à temps plein et qui ont moins de 25 ans, le chômage a baissé de 6,7 %.
On aurait presque de quoi se réjouir, donc,
si l’on ne partait pas de si haut. Cela se gâte un peu entre 25 et 49 ans. Là, la baisse du nombre de demandeurs d’emploi est limitée à 1 %. Et encore, c’est grâce aux hommes que ça baisse. Chez les femmes de cette tranche d’âge, le chômage a encore progressé au cours des douze derniers mois.
En revanche, c’est la catastrophe chez ceux que
l’on appelle pudiquement les « seniors » . À savoir les plus de cinquante ans. Le chômage de cette tranche d’âge a de nouveau progressé de 4,2 % en douze mois. C’est énorme. D’autant plus énorme que cette catégorie était déjà la plus touchée.
Il y a une trenttaine d’années, on se serait dit que
tout cela n’est pas très grave : on aurait créé des plans de départ en préretraite et, comme par magie, ces seniors auraient disparu des statistiques. Mais ce n’est plus possible. Il n’y a plus d’argent pour financer ces généreux plans. Or, à cinquante ans, compte tenu du recul de l’âge de la retraite, il nous reste encore, au bas mot, quinze ans d’activité. Soit le tiers d’une carrière « normale » . J’avoue ma perplexité : comment une société qui exclut durablement du travail des personnes en pleine force de l’âge peut- elle perdurer ? À cinquante ans, on n’est pas vieux ! J’aurai cinquante ans dans cinq ans et je rencontre encore un nombre incalculable de personnes qui m’appellent « jeune homme » …
Autre tendance inquiétante: ceux qui s’installent
dans le chômage s’y installent durablement. Plus de 40 % des demandeurs d’emploi du département recherchent du travail depuis plus d’un an. Et près du quart recherche un travail depuis… trois ans ou plus. Cela fait, au bas mot, 20 000 personnes – nos voisins, nos cousins…– qui ne retrouveront jamais d’emploi. Donc, à la dernière lecture des chiffres du chômage dans le Rhône, certains pourraient se dire que finalement, tout ne va pas si mal. Pour ma part, je crois au contraire qu’ils sont le reflet d’une tendance de fond : l’emploi, malheureusement, ce n’est plus pour tout le monde, il va falloir s’y faire.