L’édito de François Sapy
C’est étonnant à quel point la diversité sociale, c’est plus crédible quand ceux qui la vivent en parlent, et non pas des députés ou des ministres, avec leur langage convenu. Lisez l’histoire de Mourad Merzouki, gamin de Saint- Priest passionné de danse et devenu en quelques années une star internationale du hip- hop.
Notre journaliste Caroline Sicard a recueilli les confidences de ce danseur qui, la même année, fait l’ouverture des Nuits de Fourvière et entre dans le dictionnaire Larousse. L’occasion pour lui de revenir sur son passé. Son histoire, c’est un vrai conte de fées d’aujourd’hui. C’est aussi une histoire qui montre la puissance de la culture pour créer du lien.
Que serait- il advenu, si, par malheur, le responsable d’un centre culturel de Saint- Priest n’avait pas pris le risque de faire confiance à cette nouvelle forme d’art urbain, au milieu des années quatre- vingt- dix ? Si Guy Darmet n’avait pas, lui aussi, choisi de mettre en avant, sous le fantastique projecteur de la Biennale de la Danse, le hip- hop de Merzouki et sa troupe ?
Le hip- hop serait resté où il est né, loin des institutions. Et tous les pratiquants de cette danse auraient continué d’entretenir une forme de défiance vis- à- vis de nos institutions. À juste titre d’ailleurs, puisqu’ils n’auraient fait que répondre à la défiance des institutions. À la place de toute cette haine recuite, nous avons aujourd’hui un art qui nourrit toute la société et une star qui sait nous parler d’où il vient.
En retour, Mourad Merzouki a raison de vouloir « s’institutionnaliser » . Certains l’accusent de trahir la cause, mais ceux- là ont choisi de vains combats. Ont préféré rester en vase clos pour sauvegarder une soi- disant pureté des origines qui n’existe que dans leur tête.
L’histoire de Mourad Merzouki, c’est un plaidoyer pour l’ouverture et la culture. J’y pense justement cette semaine, parce que le tribunal administratif de Lyon vient d’autoriser le versement de subventions des collectivités pour le nouvel Institut français de civilisation musulmane ( 2 millions d’euros de la part de Lyon et de la Métropole), qui sera basé dans le 8e arrondissement de Lyon. Or, cet institut, s’il remplit correctement sa mission, pourra lui aussi jouer un rôle capital dans l’ouverture de notre société à cette culture. Les adeptes du « chacun chez soi » ont perdu cette fois- ci. Et c’est tant mieux.