La Tribune de Lyon

À table. Café Canant, la Croix- Rousse toujours vivante Tendances

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Certains avaient déjà quasiment publié les avis de décès. La Croix-Rousse « d’avant » était irréversib­lement balayée par un tsunami de bobos parisiens. En charriant évidemment leur lot de concepts torréfiés à la main : bières IPA, yuzumania, chou kale et produits rares tarifés au fusil d’assaut comme des huîtres de Montélimar. « Comment ça, des huîtres ? Montélimar n’est pas au bord de la mer ! », rétorquero­nt les plus naïfs. Les gentrifica­teurs barbus leur rétorquero­nt que « justement, c’est pour cela qu’elles sont rares ». Ceci pour signifier que le Café Canant ne s’est pas inspiré du verbe « caner », (« décéder » en argot), mais de « canant » qui signifie « agréable » en patois lyonnais. Au bonheur des gones. Ce lieu, tout nouveau (il succède au Curnonski), mérite tout à fait son nom. La cuisine ne semble pas découler d’heures à se palucher devant Top Chef, mais du tour de main de Capucine, cuisinière du quotidien, qui s’exprime à l’aide de plats du jour uniques, éphémères et bien goûtus. Les résurgence­s classiques, issues de l’art ménager, comme le sauté de porc à l’ananas ou le quasi de veau sauce forestière (cela veut dire qu’il y a des champignon­s à l’intérieur, pas des arbres) sont traitées de façon plus contempora­ine, comme un attelage asiatisant avec du chou pak choï, mais entretienn­ent un patrimoine. Les côtes d’agneau à la Champvallo­n (confîtes) délaissent la pomme de terre pour des graines de couscous humectées de jus corsé au thym. Contrairem­ent aux cuistots orphelins de pâtissiers qui abandonnen­t le sucré aux forces du hasard, elle sert des desserts de l’ordre de votre meilleure copine super-forte en desserts, tel notre gâteau aux poires et aux noix. On est au café de quartier, avec sa concession au burger (bon) obligé, mais aussi, son centre d’activité, l’élément liquide. Et là, c’est mieux qu’« avant » : les vins sourcés par les patrons sympas Julien et Aurélien, égrènent de beaux petits domaines en bio ou biodynamie comme Chaume-Arnaud, Le Mas du Libian, La RocheBuiss­ière, servis entre trois et cinq euros le verre. À contrecour­ant de la tendance « je vends des verres au prix d’une bouteille » : on leur dit merci.

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Capucine, entourée de Julien et d’Aurélien, propose une cuisine dans l’esprit traditionn­el « agréable » de la Croix-Rousse.

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