La Tribune de Lyon

L’édito de François Sapy

- FRANÇOIS SAPY, DIRECTEUR DE LA RÉDACTION

Lorsqu’Airbnb’ a surgi comme une météorite dans le paysage des métropoles touristiqu­es, on a beaucoup entendu les « profession­nels de la profession » crier à la mort de toute la filière du tourisme lyonnais. À tel point que nous avions voulu enquêter sur la question ( voir Tribune de Lyon numéro 687 du 7 février) : fallait- il interdire Airbnb à Lyon ? Au terme de cette enquête fouillée réalisée par Rodolphe Koller, il apparaissa­it qu’il ne fallait surtout pas faire cela.

Les derniers chiffres communiqué­s par la Chambre de commerce et d’industrie de Lyon montrent bien que nous avions raison de douter du discours dominant. Le parc hôtelier lyonnais est en pleine forme et la dimension touristiqu­e européenne majeure, qui est celle de Lyon depuis une dizaine d’années, ne fait plus un pli. Tout augmente, et c’est tant mieux : le taux d’occupation (+ 1 %), le prix moyen des chambres (+ 2,2 % à 87,20 €), le nombre de nuitées ( 5 millions, soit une progressio­n de 2 %)… Tous ces chiffres devraient donner le sourire aux hôteliers et aux restaurate­urs. D’abord, parce qu’ils montrent que le tourisme lyonnais n’est plus seulement un tourisme d’affaires, point fort de Lyon jusqu’à la fin du siècle dernier. Petit à petit, les city breakers prennent la ville d’assaut, naguère déserte les week- ends. Certes, Pollutec et Equita, à Eurexpo, ne sont pas pour rien dans les bons chiffres lyonnais de 2018. Mais le tourisme de loisirs est aussi en hausse ( 37 % des nuitées). Et c’est une très bonne chose, car le tourisme, c’est le show- room des métropoles. On ne mesure pas toujours l’impact indirect du tourisme. Il est considérab­le. Un touriste heureux de son séjour, c’est un futur salarié qui sera content d’emménager à Lyon avec sa famille ou un chef d’entreprise qui va éventuelle­ment vouloir y implanter son activité. Je me rappelle les moues dubitative­s lorsque j’évoquais Lyon il y a quelques années. Cela n’existe plus. C’est un subtil équilibre qui a conduit à changer cela : une nouvelle équipe aux manettes de l’Office de tourisme, une équipe de foot qui a dominé la France pendant sept ans, des projets d’urbanisme phare comme la Confluence et ses immeubles bigarrés… Mais c’est un équilibre fragile. Si le feu n’est pas entretenu, Lyon peut très vite retomber dans l’oubli et l’anonymat des métropoles européenne­s de taille moyenne oubliées. Et, dans le même temps, Lyon ne doit pas devenir, comme Amsterdam, Venise, Lisbonne ou Barcelone, une cité saturée de touristes qui deviennent les ennemis des habitants. Des touristes, on en veut un peu, beaucoup, mais pas à la folie. S’ils ne sont pas assez nombreux, cela nous appauvrira. S’ils arrivent en trop grand nombre, cela nous révoltera. Je ne sais pas si l’éternel poncif sur le caractère soi- disant mesuré des Lyonnais est vrai. S’il l’est, c’est en matière de tourisme qu’il faut absolument le démontrer.

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