La Tribune de Lyon

Légendes de Lyon : le diamant de la rue Juiverie

- ÉLISE CAPOGNA

oulez- vous devenir riche ? Passez par la rue Juiverie, dans l’un des plus anciens quartiers de Lyon : SaintPaul. Un trésor y serait caché, un diamant inestimabl­e dont la localisati­on aurait été découverte par le légendaire alchimiste Nicolas Flamel au XVIIe siècle. En effet, il aurait été dissimulé derrière l’une des têtes de lions qui ornent la façade du n° 23 de cette voie ancienne et il resterait une partie du butin. Mais quel maçon excentriqu­e aurait caché une pierre précieuse en plein VieuxLyon ? L’affaire exige de remonter au Moyen- Âge. Aux XIIIe et XIVe siècles, à

Vdeux pas des marchands de la place du Change vit une importante communauté juive — d’où le nom de la « rue de la Juiverie » . Suite à la funeste décision du roi Charles VI en 1394, les juifs devront quitter la France et, à Lyon, la rue qui leur servait de refuge. Leur départ permet ainsi de loger la bourgeoisi­e montante. Si le terme n’était pas pour le moins anachroniq­ue, on parlerait de gentrifica­tion… Les belles demeures qui font lever le nez des touristes ont donc été construite­s à partir de la fin du XVe siècle sur les vestiges des maisons du Moyen- Âge.

Parmi ces hôtels chics :

la maison Dugas ( ou Lentillon), qui occupe donc le fameux n° 23. Merveille d’architectu­re de la Renaissanc­e, la bâtisse serait aussi le réceptacle d’un formidable trésor laissé par les juifs de Lyon. Les chefs de la communauté auraient uni leurs fortunes en achetant une pierre précieuse dont ils se partageaie­nt la propriété. Enfermée dans un coffret, la prunelle de leurs yeux aurait été dissimulée dans une des caves du quartier. Pourquoi l’auraient- ils laissés derrière eux en quittant Lyon ? La légende reste muette sur ce point, ce qui tend à en affaiblir les fondations.

Même sur ses jambes fragiles, la rumeur parcourt les siècles. Selon des on- dits datant de la Renaissanc­e, Catherine de Médicis se rendait volontiers rue Juiverie afin de consulter l’astrologue Nostradamu­s. De là à penser que la Reine de France s’adonnait à la chasse au trésor… Et plus farfelu encore : la mort subite du fils de François Ier à Lyon serait liée à la curiosité qu’il nourrissai­t vis- à- vis du diamant perdu… Et n’aurait donc rien à voir avec sa pratique plutôt mal avisée du jeu de paume en pleine canicule. La royauté n’a pas mis la main sur la pierre. Mais Nicolas Flamel, si. C’est du moins ce qu’une rumeur tenace, relatée au XIXe siècle par le notable lyonnais Claude Bréghot du Lut, raconte. Grâce à un mystérieux ouvrage codé acheté à un voyageur tout aussi mystérieux, Flamel — alors libraire à Paris — aurait percé les secrets de l’alchimie… et, accessoire­ment, découvert l’emplacemen­t de plusieurs trésors laissés par les juifs expulsés de France. Ni une, ni deux, l’alchimiste qui n’est pas encore célèbre se lance : « Il aurait acheté […] plusieurs maisons désignées pour être celles qui recélaient les trésors ( or, argent, diamants, joyaux). Il paraît que cet inventaire indiquait que plusieurs de ces dépôts secrets avaient été placés dans des maisons de Lyon, » assure Bréghot du Lut.

Mais Flamel ne les aurait pas tous récupérés. Sur les vingt joyaux dissimulés dans l’ancienne capitale des Gaules, l’un aurait échoué entre les mains de la famille Gadagne dont la fortune ne serait donc pas à mettre sur le seul compte de son ingéniosit­é financière. Quant au second trésor découvert, il aurait été déniché à l’emplacemen­t du 23 rue Juiverie, où se tient depuis le XVIIe siècle la bien connue « Maison aux lions » avec sa belle tour en façade. Deux faits peuvent rassurer le chercheur d’or de l’ère moderne. D’abord, il resterait selon cette rumeur 18 trésors à dénicher dans Lyon. Et surtout, le trésor de la rue Juiverie aurait été offert par Nicolas Flamel comme cadeau de consolatio­n au jeune homme que sa fille avait éconduit. Une de perdue, un diamant de gagné...

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