Comment sauver la Cité de la Gastronomie
Le directeur de la Cité internationale de la Gastronomie Florent Bonnetain revient, quatre mois après l’ouverture du site, sur les débuts d’une structure aux résultats encourageants mais contrastés.
Le bilan de la fréquentation est- il satisfaisant ?
Sur la première année, nous sommes sur une tendance qui nous amènerait aux 150 000 visiteurs, ce qui est tout à fait honorable par rapport à nos prévisions : nous visons une vitesse de croisière à 300 000 visiteurs annuels. Nous en serions, en une année, à la moitié, sans les écoles ni la majorité des touristes.
Selon les moments, on a quand même l’impression que la Cité tourne à vide…
Mais sur un lieu comme celui- ci, à l’instar de l’Hôtel-Dieu, la montée en puissance est très progressive et il est difficile de tirer des conclusions avant la fin de la première année pleine. Le socle est posé, mais nous sommes en phase de montée en charge. Nous ne sommes pas encore rentrés de plain- pied dans les publics plus « identifiés » : les scolaires viennent d’euxmêmes, alors que l’on ne commence pas de manière organisée avant la rentrée des vacances de février. Quant aux tour- opérateurs, nous commençons seulement à les recevoir. On ne peut pas tout mener de front.
À ce jour, qui vient ? En le visitant, on a plutôt l’impression que le musée est destiné aux étrangers qui ne connaissent que peu la gastronomie…
Nous sommes plutôt sur 2/ 3 de régionaux et 1/ 3 de touristes, nationaux ou étrangers. Le public régional reste le coeur du projet. C’est un lieu pensé pour les habitants de la région, ceux qui sont capables de revenir.
Mais qu’est- ce qui pourrait pousser un visiteur à revenir ?
C’est une Cité, pas un musée, donc il y a des activités différentes. Mais le montage du lieu est complexe, on rajoute petit à petit des couches au projet. Pour démarrer, des choix ont dû être faits. Nous avons néanmoins ouvert une réflexion, car la faiblesse de ces partis pris, c’est qu’il manque un récit plus construit pour le visiteur averti, qui peut rester sur sa faim. Nous pensons donc aussi revisiter l’histoire de la gastronomie lyonnaise au- delà d’une simple période « Mère Brazier / Paul Bocuse » .
À quel niveau de chiffre d’affaires se trouve le point d’équilibre ?
À 200 000 euros, ce serait satisfaisant.
Êtes- vous confiant ?
C’est un équipement encore très peu connu, qui n’a pas bénéficié du lancement de l’Hôtel- Dieu qui avait déjà eu lieu, et pâti d’une période préélectorale qui a empêché de faire un « gros » lancement. Tout cela lui a un peu coupé les ailes. On aurait aimé que ça parte plus vite, on doit prioriser. Il y a quand même eu un gros investissement de deux millions d’euros de la part de Magma-Cultura.
Comment rattraper ce retard, par la pub, le marketing ?
Le public lyonnais ne s’est pas encore pleinement approprié l’Hôtel- Dieu, et nous ne sommes pas déconnectables de cela. Le moment venu, ce sera un puissant vecteur. Mais le numérique n’est pas la solution magique. On croit au bouche- à- oreille. Par exemple, grâce à l’espace Miam Miam, les familles viennent d’elles- mêmes. On croit davantage à promouvoir de manière morcelée nos activités, comme l’assiette du samedi soir ou bientôt les chefs invités.
Le prix de 12 euros l’entrée + 12 euros de dégustation a beaucoup fait parler. La formule a- t- elle du succès ?
Environ 20 % du public prend la dégustation, et c’est le ratio que nous avions prévu. Mais nous réfléchissons au moyen de permettre au public de prendre la dégustation sans avoir à payer aussi l’entrée, en organisant des séances sur les tables disposées dans la boutique à l’entrée. Un autre moyen sera de souscrire à l’abonnement que nous lançons, à 51 euros. Quand on rationalise, les principales critiques ne visent pas le prix. D’autres institutions nous demandent même « comment t’en sors- tu avec ce que tu proposes à seulement douze euros ? » Car je rappelle que nous sommes en délégation de service public, sans subvention, et que l’entrée visiteurs et la dégustation représentent 80 % de notre chiffre d’affaires. Il faut en faire, des entrées, pour couvrir nos dépenses, comme chauffer un dôme de 32 mètres sous plafond !