La Tribune de Lyon

Classique. La Force du destin pour rouvrir l’Auditorium - Théâtre. Bellorini, tout pour la musique ! - Cinéma. Dardenne, le prix Lumière de la fraternité

- LUC HERNANDEZ

e moment était particuliè­rement émouvant. Les musiciens de l’ONL avaient voulu rendre hommage aux soignants depuis le début du confinemen­t. Après avoir fait nombre de concerts de musique de chambre en Ehpad pendant plusieurs semaines, ils ont tenu parole : offrir un vrai beau concert à plus de 700 soignants jeudi dernier, dirigé de main de maître par le nouveau directeur musical, Nikolaj SzepsZnaid­er. Voilà plus de quatre mois que les portes de l’Auditorium ne s’étaient pas ouvertes pour accueillir du public, conquis jusqu’à la standing ovation, en respectant les gestes barrières, l’un n’empêche pas l’autre. Le masque, porté tout au long du concert par l’ensemble des spectateur­s, n’empêche pas non plus les émotions : quelques notes en cavalcade de La Force du destin et nous étions déjà en larmes, tellement émus d’entendre une aussi belle musique live envahir à nouveau la plus grande salle symphoniqu­e de Lyon.

LMaître de cérémonie.

L’orchestre sonnait d’autant mieux que Znaider a d’ores et déjà commencé de la façonner à sa main. La rencontre entre Znaider et Lyon aura bien lieu : en plus de sa hauteur de vue musicale, le nouveau chef de l’ONL est un maître de cérémonie hors pair, faisant l’effort de présenter chaque morceau en chapardant dans l’assistance quelques mots de français, non sans humour : Pour « apprivoise­r le destin » , il est passé de la force à l’amour en enchaînant sur le Roméo et Juliette de Tchaïkovsk­i, un des compositeu­rs fil rouge de la saison prochaine. « Roméo et Juliette, ce n’est peut- être pas le modèle idéal pour l’amour » , s’est amusé le maestro, « mais la musique est vraiment extraordin­aire. » Il avait bien raison. Vivement la saison prochaine, avec ou sans masque, qu’on poursuivre le viatique avec un aussi bon compagnon de route.

CINÉMA

Ils ont révolution­né le cinéma à eux tous seuls : la caméra à l’épaule collée à la nuque de ses personnage­s, utilisée jusque dans le de Gus Van Sant, doit par exemple beaucoup à ( 1999), Palme d’or qui sonnait comme une déflagrati­on dans le cinéma contempora­in. Ils ont été formés au théâtre libertaire d’Armand Gatti, puis au documentai­re. Peut- être leur rétrospect­ive au festival Lumière sera- t- elle l’occasion de découvrir leurs premières oeuvres, comme avec Bruno Crémer ( 1987) ou avec Robin Renucci et Fabienne Babe.

Producteur­s et dramaturge­s.

Passeurs et producteur­s de films parfois loin de leur propre esthétique ( comme

de Jacques Audiard, autre invité de Lumière 2020), ils conjuguent une direction d’acteurs hors pair, héritée du théâtre de Gatti, avec une constructi­on scénaristi­que hors du commun, souvent sous- estimée. Ni misérabili­ste ni sensationn­aliste, le cinéma social des Dardenne construit des personnage­s ordinaires du monde qui nous entoure pour mieux les confronter à un dilemme dramatique qu’ils vont devoir dépasser.

ou sont tous marqués par cet humanisme pour dépasser des conflits humains, trop humains, réapprenti­ssage d’une fraternité dans un monde hostile.

Incarnés par les plus belles révélation­s d’interprète­s ( Jérémie Renier, Émilie Dequenne, Olivier Gourmet…) les personnage­s des Dardenne sont nos frères, on a hâte de les célébrer avec ceux qui leur ont donné vie, qui figurent pour nous au panthéon des plus grands réalisateu­rs en activité. Le choix de la Belgique pour le prix Lumière est d’autant plus beau qu’elle reste le pays touché par le plus fort faux taux de mortalité lié au Covid- 19. Loin d’être un prix de transition dans une année amputée par une crise sanitaire qui ne manquera pas de s’inviter d’une façon ou d’une autre au festival en octobre prochain, le prix Lumière des Dardenne s’annonce à nos yeux comme un des plus engagés et émouvants. Vivement cet automne !

12e prix Lumière attribué à Luc et Jean- Pierre Dardenne. Festival Lumière, du 10 au 18 octobre 2020.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France