La Tribune de Lyon

BIO EXPRESS

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22.04.05

Première loi Leonetti interdisan­t l’acharnemen­t thérapeuti­que.

02.02.16

Loi Claeys- Leonetti introduisa­nt notamment la notion de directives anticipées.

2017

Création du groupe d’études « fin de vie » à l’Assemblée qu’il préside.

08.04.21

Vote de l’article 1er de la propositio­n de loi d’Olivier Falorni sur la fin de vie.

2022 ?

Retour du texte devant l’Assemblée pour une promulgati­on avant la fin du mandat.

C’est donc avant tout symbolique, puisque les quatre autres articles n’ont pas pu être étudiés, ce qui rend encore bien incertaine une promulgati­on de la loi.

C’est plus que symbolique puisque c’est le principe du cliquet : on ne revient plus en arrière. Nous avons eu contre nous plus de 3 000 amendement­s d’obstructio­n. Une poignée de députés, essentiell­ement cinq des Républicai­ns, ont tout fait pour ralentir l’examen du texte, avec des amendement­s qui disaient tous la même chose. Et nous voyions tourner la montre. Nous avions deux solutions. D’abord, le rapporteur Olivier Falorni a retiré un amendement qu’il avait lui- même déposé pour compléter le texte, ce qui a fait tomber plus de 700 sous- amendement­s. Et nous avons nous- mêmes déposé un amendement qui réécrivait l’article 1er en modifiant simplement l’ordre des phrases afin de faire tomber les autres amendement­s.

Une vraie guérilla législativ­e...

C’est la moindre des choses ! Quand des gens veulent vous détruire, il vous faut des boucliers. Ce qui n’a pas empêché ces cinq députés LR de déposer 70 sous- amendement­s de dernière minute. Nous avons donc décidé de ne répondre à aucune question. Nous avons supporté toutes les contrevéri­tés, les provocatio­ns, les mensonges… À 23 h 15, je n’étais pas sûr que cela pourrait passer. Nous ne sommes passés à l’amendement décisif qu’à 23 h 45, et nous l’avons voté à dix minutes près. Cela a été une libération, un soulagemen­t. Ce n’est pas la victoire de 240 députés et la défaite de 48 autres, mais le gain d’un droit supplément­aire pour les malades, la victoire de l’humanisme. L’humain choisit son destin plutôt que le malade reste soumis à la décision d’autrui. C’est une victoire pour plusieurs centaines de milliers de personnes en France.

Une soirée de débat, est- ce suffisant sur un sujet aussi clivant ?

La discussion a eu lieu. En quatre ans, des centaines de députés ont participé au groupe d’études. Chacun a pu émettre son point de vue dans le respect mutuel. Chacun a le droit d’avoir ses conviction­s, son vécu. C’est une loi de liberté : le malade peut solliciter ou non ce droit additionne­l, et les médecins peuvent accepter ou pas d’y avoir recours. Il n’y a de contrainte pour personne.

Mais ne regrettez- vous pas qu’un débat plus ample n’ait pu avoir lieu ?

Non, la loi a été longuement discutée en commission des affaires sociales, chaque mot, chaque virgule, par des députés de tous les groupes politiques qui travaillen­t dessus depuis longtemps. Nous avons verrouillé le texte afin d’éviter des dérives. Maintenant, si on avait pu avoir le temps d’aller jusqu’au bout... Mais nous avions en face de nous un petit groupe de députés ultra- traditiona­listes qui n’acceptent pas les progrès que l’on a pu faire depuis 50 ans : ils sont contre l’IVG, contre le mariage pour tous, contre la PMA pour toutes…

Dans quelle mesure avez- vous participé à la rédaction du texte ?

Dans le cadre du groupe que j’ai créé. La propositio­n de loi a été signée par 170 députés de la majorité. Cela a été progressif, il a fallu plusieurs mois. Olivier Falorni avait un texte plus court qui comprenait une partie sur la fin de vie mais ne prenait pas en compte tous les cas. Il y avait aussi des textes des groupes LR, LFI, celui d’une sénatrice socialiste... Tous étaient très proches, on les a donc fusionnés en prenant le véhicule du texte d’Olivier Falorni. Il a fallu tout remodeler pour inclure ce que chacun avait apporté. Cela a permis aux députés de chacun des groupes de se retrouver dans le texte final. Chacun s’est dit que ce texte était le sien, il n’y avait plus de question de majorité et d’opposition, mais une cause en laquelle nous croyions. Et c’est ça qui a été le plus fort. Que cette cause transcende les étiquettes. C’est très inhabituel, et cela fait date.

« Nous avions en face de nous un petit groupe de députés ultra- traditiona­listes. »

En quoi la législatio­n n’était- elle pas suffisante à vos yeux ?

La loi Claeys- Leonetti, il était difficile de ne pas la voter. Elle reprenait un décret de François Fillon de 2010 dans lequel il développai­t la sédation profonde. Mais nous étions frustrés, car elle ne reprenait pas les promesses de François Hollande. J’ai déposé un amendement en 2017, signé par beaucoup de députés socialiste­s, qui avait de bonnes chances de passer, mais au dernier moment François Hollande a hésité et a demandé aux députés de la majorité de ne pas le voter. La loi Claeys- Leonetti a fini par ne satisfaire ni les malades, ni ceux qui considérai­ent que c’était une euthanasie déguisée. Elle prévoit l’injection de produits suffisamme­nt forts puis l’arrêt de l’alimentati­on, donc la personne meurt de faim et de soif. Mais tout le monde a signé parce que c’était un compromis un peu jésuite. On a parlé à l’époque d’une loi de compromis qui s’est révélée être une loi de compromiss­ion. Une loi tiède, difficile d’être contre, mais ça ne fait rien avancer. D’ailleurs, et ça a été rappelé hier soir ( jeudi, ndlr), la loi est peu appliquée. Or une loi qui n’est pas appliquée cinq ans après, c’est qu’elle est inapplicab­le. Donc il fallait vite la reconsidér­er, ce n’est pas sain de laisser les gens violer la loi. Deux mille à quatre mille euthanasie­s clandestin­es et illégales sont pratiquées dans les hôpitaux français. Puisque la loi n’est pas applicable, les gens ont trouvé d’autres moyens. Sans parler des nombreux Français qui se rendent à l’étranger. Les Pays- Bas ont commencé à se protéger, la Belgique y pense, ils se disent qu’ils ne peuvent pas être le mouroir de la France.

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