La Tribune de Lyon

L’Extension du domaine de la lutte ?

- LUC HERNANDEZ

Les occupants de l’Opéra de Lyon auront donc fini par quitter les lieux dès qu’il s’est agi de répondre de leurs actes, à peine assignés devant le tribunal par la direction de l’établissem­ent, les politiques locaux comme nationaux étant restés eux étrangemen­t passifs pendant un conflit qui aura duré des mois. Et qui dure encore : « le TNP restera occupé » annonce le collectif unitaire 69, alors que les premières représenta­tions du superbe Onéguine de Jean Bellorini doivent débuter la semaine prochaine. Mais de par « la configurat­ion des lieux » et une « entente cordiale avec le directeur du TNP » revendiqué­e, c’est à une drôle de « cohabitati­on » qu’il faut s’attendre. Le milieu du théâtre, qui a largement milité pour rouvrir en même temps que les musées qui à l’origine devaient le faire avant lui, a toujours été plus politisé qu’un autre milieu culturel, toujours en première ligne des mouvements sociaux. C’est le sens de la lettre au public du directeur du TNG, Joris Mathieu, qui appelle à des « retrouvail­les fraternell­es » , en continuant de porter « une réelle attention à l’anxiété légitime des plus précaires d’entre nous. » C’est tout à son honneur, si tant est que les mouvements d’occupation représente­nt les plus précaires, ce qui reste à prouver. Nous connaisson­s bon nombre d’intermitte­nts indépendan­ts dans des milieux beaucoup moins aidés comme la musique ou l’humour qui ne bénéficien­t pas de la même attention des syndicats. Le théâtre est donc une grande famille, et tant mieux si un équilibre est trouvé entre les revendicat­ions portant essentiell­ement sur les nouvelles règles de la loi chômage entrant en vigueur le 1er juillet, et la réouvertur­e des lieux culturels, empêchée par quelques irréductib­les du spectacle vivant, après pourtant sept mois de fermeture.

Montrer ses « muscles » . Une « prise de parole » avant les spectacles est donc envisagée avant les spectacles, au TNP comme au TNG, en attendant des « choses plus musclées » promises par le collectif pour les festivals d’été, selon les orientatio­ns nationales du mouvement. Le bras de fer ne fait donc que commencer, sans qu’on sache pour le moment s’il accouchera d’un pet de lapin ou d’un nouveau conflit intermitte­nt. Reste une inconnue : celle du public qui, par définition, est solidaire des subvention­s et des indemnités chômage, et qui paie sa place en plus de payer des impôts. Il a répondu pour l’instant on ne peut plus présent aux festivals d’été : les billetteri­es des Nuits de Fourvière, de Jazz à Vienne ou du festival Berlioz ont démarré sur les chapeaux de roue. Il faudrait voir à ne pas gâcher la fête, surtout pour les théâtres qui, en terme de taux de fréquentat­ion, sont ceux qu’il fréquente le moins ( moins de 78 % en moyenne quand l’opéra et la danse survolent les 90 %). Après avoir été cocufié par un gouverneme­nt qui a imposé une des fermetures des lieux culturels les plus massives et les plus longues d’Europe, il ne faudrait pas qu’il se retrouve privé de retrouvail­les artistique­s, sous peine de ne plus avoir très envie de remettre les pieds dans une salle de théâtre, ce à quoi personne n’a intérêt. Et c’est bien lui qui aura le dernier mot.

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Occupants devant le TNP de Villeurban­ne.

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