La Tribune de Lyon

Bruno Bonnell : « À la décroissan­ce et à l’anxiété, j’oppose la relance »

- PROPOS RECUEILLIS PAR LILIAN RENARD

Candidat de la majorité présidenti­elle aux élections régionales, le chef d’entreprise et député Bruno Bonnell s’imagine en homme de la relance et du renouveau macroniste. Bagou, punchlines, campagne enjouée et mesures tapageuses forment sa ligne d’attaque, dont il distribue les flèches tous azimuts. Avec le RN en cible de choix et un enjeu compliqué : parvenir à se hisser à sa hauteur le 20 juin.

Comment appréhende­z- vous cette élection ?

À l’échelle de notre région. Pas pour rejouer 2017 ou faire la générale de 2022, tenter de nous vendre le match entre le prince déchu Wauquiez et l’éternel retour de la princesse Najat. Jamais les gens ne parlent de cela. Pour eux, il y a deux sujets, l’un de court terme qui parle de sécurité, de santé, de vaccinatio­n ; l’autre qui est une préoccupat­ion pour leurs enfants et petits- enfants. Eh bien ! moi je suis le candidat de leurs enfants et petits- enfants, de la reconstruc­tion et de la renaissanc­e.

En quoi la région Auvergne- Rhône- Alpes aurait besoin d’être reconstrui­te ?

On va sortir d’une éprouvante et inédite crise. On ne travailler­a plus pareil, on n’apprendra plus pareil, on ne passera plus de vacances de la même façon. Face à cela, soit on continue à dire que le monde est tristesse et anxiété, que doit s’y imposer la décroissan­ce ; soit à l’inverse on oppose l’innovation et la relance.

Une relance économique ?

Est- ce que Laurent Wauquiez a bien géré la Région ? Sans doute. Et alors ? Est- ce qu’il a développé la Région ? Absolument pas. Comment se fait- il que dans un territoire si riche en intelligen­ce, en brevets, en sociétés, en formation, on soit encore à – 30 % de PIB par habitant par rapport à Düsseldorf, Cologne, Berlin, Barcelone ou Valence ? L’économie ne l’intéresse pas. Je veux que nous ayons une croissance à deux chiffres chaque année.

La croissance comme seule boussole, ce n’est pas un peu dépassé ?

Un grand communiste un jour a dit : « Il ne faut pas désespérer Billancour­t. » Eh bien ! il ne faut pas désespérer les Français et les Auralpins. La solution, ce n’est pas le refus de la 5G, du Lyon- Turin, du nucléaire comme le prétendent les Verts, ce n’est pas aller contre une agricultur­e qui progresse par l’automatisa­tion. Refuser le Lyon- Turin, c’est refuser une exportatio­n décarbonée de nos produits. Nous aussi on veut 100 % de produits locaux et 50 % de bio dans les lycées, mais le localisme ne doit pas empêcher nos agriculteu­rs de se développer au- delà.

L’innovation, l’économie formeront donc l’axe principal de votre mandat ?

Non. La clé de voûte, c’est le savoir. Le premier budget devant l’économie, ce sera le savoir. C’est- à- dire : culture, éducation, formation. Je veux faire de cette région une région modèle de savoir, de savoir- être et de savoir- faire. Ça, c’est un boulot sur le temps long, pas sur un coup de menton.

Il y a aussi des urgences à gérer. Comme ce fut le cas avec la crise sanitaire et cependant que l’État semblait tâtonner… Comment observez- vous le bilan du sortant sur le sujet ?

Comme une illusion d’optique. Il a dépensé plus d’argent dans les bâches mises devant les vaccinodro­mes que dans la réalité de ce qui a été fait pour les gens. Prenez la campagne de tests dans les lycées… Ça a concerné quelques milliers de lycéens ; or il y a 600 000 élèves sur notre territoire. Pour lui, la Région est un marchepied vers d’autres ambitions. C’est bien pour cela qu’il a fait le pays des Schtroumpf­s, en mettant des panneaux bleus partout.

Vos adversaire­s vous prêtent pourtant des idées d’alliance à droite au deuxième tour… Déjà, j’ai toujours voté à gauche. Et je ne ferai d’alliance avec personne, sauf s’il y a un danger de voir rentrer le RN d’une façon majoritair­e au Conseil régional. Face à un parti extrême, dans le pays de la Résistance, de Jean Moulin et du Vercors, LReM restera le dernier rempart.

À vouloir demeurer seuls face au RN, Emmanuel Macron et LReM ne jouent- ils pas un jeu dangereux ?

Macron met du contraste sur des lignes de fracture existantes, il n’est qu’un révélateur. Il dit aux Français : ne vous trompez pas. Si vous choisissez d’aller vers une droite qui s’est perdue, vous allez vers le Rassemblem­ent national. Wauquiez le signe d’ailleurs. Même Kotarac n’oserait pas faire le tract qu’il a produit sur la sécurité.

N’est- ce pas un domaine où la Région doit s’impliquer ?

Bien sûr que si. Mais pas sur ce terrain, c’est celui de la droite extrême. Les histoires de milices régionales, c’est sans moi. En plus, c’est inefficace, voire illégal, comme la reconnaiss­ance faciale. Sur le sujet, il faut d’abord s’appuyer sur les forces de police nationales, sans se substituer, et ensuite intervenir auprès des Mairies avec des moyens financiers, sans faire de l’esbroufe. Puis on s’appuiera d’une part sur le service national universel ( SNU) obligatoir­e, et d’autre part sur un vaste plan de prévention dans les lycées.

Pouvez- vous détailler ?

Nous allons embaucher des pions, des médiateurs, à travers des associatio­ns, pour de la prévention sur les addictions – drogue, alcool et écrans. Ils interviend­ront aussi sur les maladies sexuelleme­nt transmissi­bles pour expliquer que le corps de l’autre doit être protégé et afin de sensibilis­er sur le respect dû aux femmes. 80 % de la délinquanc­e vient de ces sujets- là.

« Je ne ferai d’alliance avec personne, sauf s’il y a un danger de voir le RN majoritair­e au Conseil régional. »

Et vous souhaitez généralise­r le SNU ?

Avec le SNU, on peut redonner des bases de civisme, par la culture, l’éducation, le vivre- ensemble, les valeurs de la République. Donc, on créera, avec l’État, un SNU obligatoir­e pour 100 000 jeunes de 16 ans chaque année. Certes, je n’ai pas le droit de le rendre obligatoir­e, mais en tout cas suffisamme­nt motivant. Pourquoi ne pas passer son permis gratuiteme­nt pendant ce service national universel ? Pourquoi ne pas avoir la possibilit­é de partir en voyage ?

En termes de déplacemen­ts, on vous a reproché de vouloir relancer l’A45, un projet enterré…

Je suis au courant que la déclaratio­n d’utilité publique est tombée, je sais tout ça. Mais 100 000 personnes transitent entre Lyon et Saint- Étienne, ce sera le double en 2050. Ignorer l’idée qu’il faut un nouvel axe de mobilité à plus grande capacité entre ces deux villes, c’est une erreur historique. J’ai simplement dit, et je persiste, qu’il faut réveiller l’idée d’un nouvel axe, comme je vous dis qu’il faut régler le même problème avec Grenoble. C’est un devoir de réfléchir à ça.

Ça ne peut pas être par le train ?

Le fameux RER à la lyonnaise.

Oui, il faut un RER à la lyonnaise, vers Saint- Étienne, Grenoble. Il en faudra un vers Valence, Vienne ou Villefranc­he. Il n’y a aucune raison que ces villes- là ne nourrissen­t pas et ne se nourrissen­t pas du hub européen qu’est Lyon.

Quelle première mesure prendrez- vous si vous êtes élu ?

50 euros offerts à tous les foyers auralpins, dans le premier mois de notre gouvernanc­e. Il suffira de s’inscrire, avec un engagement sur l’honneur de le dépenser dans la région. On vous donne les moyens de donner un coup de fouet à votre région. Ma devise, c’est prospérité, équité, fraternité, ce n’est pas charité et désespéran­ce comme je l’entends parfois chez mes adversaire­s écologiste­s ou socialiste­s. Je crois en la force de la redistribu­tion de la valeur créée.

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