La Tribune de Lyon

BIO EXPRESS

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05.05.1997

Naissance à La GarenneCol­lombes ( 92).

2018

Double master en physique, science de la matière et mécanique des fluides.

02.2019

Naissance de l’idée d’envoyer des papillons dans l’espace.

2020

Création du labo Phoebus, Flight Observatio­n of Butterflie­s Under Space- like Gravity.

05.2021

Lauréate de la bourse Amelia Earhart pour les doctorante­s en génie aérospatia­l, sciences spatiales. fait éclore des oeufs. Plus tard, ces cailles qui avaient connu la microgravi­té ont été mises dans un vol paraboliqu­e, et on s’est aperçu qu’elles arrêtaient de battre des ailes et se laissaient porter au bout de sept vols. Alors que celles qui étaient restées sur terre, le groupe de contrôle, essayaient encore de voler.

Pourquoi des papillons et pas des oiseaux ? Pour manipuler des oiseaux, il faut des certificat­s de compétence, des autorisati­ons délivrées par des comités d’éthique… Ce qui n’est pas le cas avec les insectes. J’ai donc pris celui qui était le plus proche de l’oiseau. De plus, le papillon est un insecte qui bat très lentement des ailes. La fréquence pour une abeille est autour de 250 Hz et un pour papillon, une vingtaine. Ça va nous permettre de les filmer sans avoir besoin de caméras très chères, pour ensuite reconstitu­er le mouvement en 3D. Une caméra de type GoPro peut suffire et nous permettre dix images par battement d’ailes.

Quels papillons emmener pour une expérience pareille ?

C’est le problème ! Il faut bien choisir au départ. Alors on a contacté le Muséum d’Histoire naturelle. Faut- il qu’ils soient tropicaux, locaux, lesquels choisir pour qu’ils ne dorment pas au moment où l’on doit faire les manipulati­ons ? On a des pistes pour des papillons tropicaux, car ils ont l’habitude de se déplacer dans des milieux denses, donc des espaces restreints. Et comme on ne choisit pas les dates des vols paraboliqu­es, il y a un risque à utiliser des papillons locaux qui suivent un rythme marqué hiver- été. De plus, dans l’avion, la pression n’est pas celle de la pression atmosphéri­que, donc idéalement, il nous faudrait des insectes capables de voler dans ces conditions. L’idéal serait des papillons d’altitude. Mais trouver des papillons d’altitude tropicaux et disponible­s à l’achat, ça devient compliqué ! Sans compter que l’on aura besoin de chauffage dans l’avion, car il y fait 18 degrés et que ces espèces ont besoin d’au moins 24 degrés.

Quel sera le dispositif dans l’avion ?

On a actuelleme­nt un prototype doté d’une sphère dans laquelle on mettra les papillons, sphère ellemême montée dans un cadre cubique pour pouvoir filmer depuis les quatre angles du cube et s’assurer que tous les papillons soient au moins sur deux caméras à chaque fois. Mais on a encore un problème pour stimuler le vol du papillon, il est donc encore possible que l’on parte sur un modèle en tunnel avec un stimulus, par exemple lumineux, au bout.

À quoi ces résultats pourraient- ils servir ?

Si en conquête spatiale, on réfléchit par exemple à construire une base lunaire, il faudra décider si l’on veut des insectes ou un robot pollinisat­eur pour obtenir des plantes. Un oeuf de papillon, ça ne pèse rien, mais par contre un robot, c’est de la charge en plus.

Il y a aussi tout le sujet de la conception de drones, en particulie­r les drones volant en battant des ailes, en plein essor car très efficaces en matière d’énergie, tout en générant beaucoup de portance. La Nasa est en train de développer un système d’essaim de ces drones, Mars Bees, qui permettrai­t d’explorer sur Mars autour du Rover sur de plus grandes distances. Arriver à préprogram­mer les motifs de battement d’ailes nécessaire­s sur une autre planète permettrai­t donc d’améliorer le développem­ent de ces drones- là.

« La chouette est capable de voler à très basse vitesse, avec une très grande portance et très peu de traînée. Ça, on ne sait pas faire. »

Vos travaux pourraient- ils aussi permettre de faire voler les avions de manière plus économique ?

Complèteme­nt. Actuelleme­nt, quand on veut obtenir “telle” portance, on n’a aucun moyen d’agir sur la traînée globale, car le rapport portance- traînée est à peu près le même sur la plupart des avions. Par conséquent, pour avoir la portance qu’on veut, on augmente la vitesse de l’avion : en doublant la vitesse, on multiplie la portance par quatre. Mais la traînée augmente d’autant. On a peu de moyens de jouer sur ça. On rajoute des ailerons, des choses comme ça, mais il y a actuelleme­nt des travaux sur les animaux via le biomimétis­me. Si l’on prend la chouette, elle est capable de voler à très basse vitesse, avec une très grande portance et très peu de traînée. Or, ça, on ne sait pas faire, ou alors avec un planeur. Il a été découvert qu’au niveau des plumes, elle dispose de microstruc­tures, des sortes de peignes, qui créent de mini tourbillon­s en piégeant l’air et qui réduisent ainsi la traînée globale et augmentent la portance. Le papillon fait partie des espèces les plus efficaces. Pourquoi on n’arrive pas à faire quelque chose d’aussi efficace et simple en apparence ? Voir qu’il y a des choses dans la nature qui marchent vraiment bien, ça donne envie de mieux les comprendre !

Espérez- vous toujours envoyer vos papillons dans l’espace plus tard ?

Si on arrive à montrer qu’il y a des phénomènes intéressan­ts à découvrir, comme on l’espère, en vol paraboliqu­e, on pourra ensuite améliorer le projet pour tenter d’aller sur l’ISS, oui. Mais on en est encore très, très loin ! »

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