Rive droite, où se joue le bilan des Verts
Après avoir théorisé l’humilité urbaine, répété sans fin que l’ère des totems et des bâtisseurs avait vécu, les Verts convoitent finalement eux aussi leur Grand oeuvre. Cette geste écologiste s’écoulera sur la rive droite du Rhône, d’une façon sans doute aussi agitée que ses eaux tumultueuses, en un symbole assumé de la fin des temps automobiles. La transformation de cet axe routier majeur et historique en zone paisible, réservée pour l’essentiel aux piétons et vélos, tient encore pour l’heure du rêve doux. Ou fou. Dans les deux cas, et pour une centaine de millions d’euros, dont 30 sur ce mandat, le projet entend poser un acte volontaire dans l’espace urbain. Le premier tant les Verts avaient plutôt raboté que bâti jusque- là ; les tours à Part- Dieu, les signes de l’expansion ou les mètres carrés.
Il leur fallait désormais et comme aux autres, un dessein visible en coeur de ville. Sens unique, quais élargis, voies rabotées, belvédères…
Tout est à construire. Qu’ils y parviennent en douceur, apaisent l’espace public sans trop tourmenter le passant, et on saluera la réussite. Comme celle que Gérard Collomb, devançant l’heure verte, avait su produire sur les quais de Saône. Sauf que sur ces rives soeurs passent
80 000 véhicules par jour… Il y a donc un risque à pousser le pari trop loin, celui misant sur l’idée que compliquer les déplacements en voiture et rendre plus agréables les alternatives suffit à changer les comportements.
Que les Verts se trompent dans le dosage et la congestion du centre — déjà bien avancée — gonflera sans retour le flot des mécontents. Grégory Doucet et Bruno Bernard pensent devoir l’assumer, se disent que les consciences s’éveilleront dans les bouchons. Entre quais aérés et circulation compliquée, entre vélos et autos, c’est donc tout leur projet politique qui se joue symboliquement sur la rive droite.