La Tribune de Lyon

Mon déjeuner avec Julien Dumont

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Tandis que nous prenons contact avec le nouveau propriétai­re du musée Miniature et Cinéma, nous lui proposons de nous rendre au Food Traboule, adresse aux multiples comptoirs ouverte par Ludovic et Tabata Mey en 2019 à quelques dizaines de mètres de là. Julien Dumont nous confie alors ne jamais avoir pris le temps d’y aller. Mais lorsque nous nous y rendons deux semaines plus tard, l’intéressé nous confie avoir depuis rattrapé son retard, et nous emmène directemen­t à l’étage. Avant cela, un petit tour s’était imposé dans le musée qui pourrait bien connaître quelques évolutions sous la houlette du nouveau maître des lieux. Luimême maquettist­e, Julien Dumont aimerait mieux mettre en valeur les modèles réduits du fondateur du musée Dan Ohlmann, dont la scénograph­ie n’a pas évolué depuis l’installati­on dans la Maison des avocats en 2005. Réparation des mécanismes de la reine Alien — mise en valeur dans un nouveau décor —, installati­on de bornes numériques, enregistre­ment de vidéos expliquant l’histoire des différente­s pièces, création d’une boutique, voire même d’une verrière permettant d’exposer des vaisseaux dans la cour intérieure : les idées et les projets ne manquent pas pour donner un coup de jeune au musée. Producteur, réalisateu­r et spécialist­e des effets spéciaux dans son autre vie profession­nelle — qu’il partage avec la Suisse et Los Angeles —, ce passionné touche- à- tout peut réaliser le matin un documentai­re sur les missions Apollo et racheter le plus grand fonds de volcanolog­ie au monde dans l’après- midi. Le tout sans délaisser les 500 pièces exposées dans les 2 000 m ² de son musée du Vieux- Lyon, sans compter les

2 000 à 3 000 en réserve en cours d’inventaire. Le bâtiment vieux de 700 ans n’est pas sans poser quelques contrainte­s, mais ce passionné d’architectu­re se délecte au quotidien de la magie des lieux. « Le bâtiment a connu François Ier, Henri IV, Louis XIV, la Révolution, c’est dingue. »

besoin de diplôme pour être le premier à faire venir les maquettes de Star Wars en France. La vente a été signée le 8 décembre, je ne suis pas du tout superstiti­eux, mais je me suis dit que c’était un beau signe. Par contre, j’avais complèteme­nt zappé la Fête des Lumières, c’était un peu la folie dans le VieuxLyon ( rires) !

Y avait- il d’autres concurrent­s dans les rangs ? Le musée a failli être parisien, ça ne s’est pas joué à grand- chose. Mais Dan avait à coeur que le musée reste à Lyon. Et puis c’est la ville du cinéma, donc à un moment, tout se rejoint.

Quel a été le montant de la transactio­n ?

C’est contractue­llement secret. En tout cas, c’est plusieurs millions.

Vous êtes un profession­nel du cinéma, que comptez- vous faire de la partie des miniatures ?

Je suis maquettist­e depuis l’enfance. J’étais au lycée Saint- Exupéry à la Croix- Rousse où j’avais monté un club de modélisme. J’ai toujours adoré les miniatures. En France, ça a toujours eu un côté un peu naze, alors qu’au Japon ou aux États- Unis, c’est un art. Ma première, c’était le module lunaire. Moi je n’ai pas grandi avec Maître Gims et TikTok, mais avec l’aventure spatiale, la navette, la future station internatio­nale, c’était dingue… Donc le musée réunit mes deux passions, cinéma et miniatures.

Comment souhaitez- vous faire évoluer le musée ?

J’aimerais qu’il soit un point de ralliement, non pas que du cinéma mais de tous les arts narratifs, comme les jeux vidéo. J’aimerais pouvoir exposer des illustrate­urs, avoir une partie stop motion dans le musée… Tout est lié, tous les réalisateu­rs se sont inspirés de la BD. S’il n’y avait pas ( Jean- Claude) Mézières, il n’y avait pas Star Wars. Je suis un fan de Picsou, je vais faire venir des planches originales de La jeunesse de Picsou parce qu’il faut savoir qu’il a inspiré Georges Lucas et Steven Spielberg dans Indiana Jones. On va également mettre tout notre atelier de restaurati­on et notre studio de tournage au Pôle Pixel. On va lancer une chaîne YouTube du musée avec plein de vidéos sur les coulisses des objets de cinéma. Si on va chercher un objet incroyable à Los Angeles, on va le filmer. On veut vraiment faire vivre l’envers du décor aux gens, les coulisses du musée qu’on ne voit jamais. Et en fin d’année, on aura normalemen­t une expo incroyable du créateur de Star Wars, Jurassic Park… Ça sera une première mondiale.

Décrivez- nous une journée type de votre prise de fonction ?

Les journées durent 24 heures. Le matin, c’est l’ouverture du musée, il faut nouer des contacts, rechercher des objets… Et le soir, je m’entretiens avec mon associé de Los Angeles pour les tournages de film. En ce moment, on produit Werner Herzog. Je ne prends pas de vacances, mais les vacances c’est un peu tous les jours.

La vente a été signée le 8 décembre, je ne suis pas du tout superstiti­eux, mais je me suis dit que c’était un beau signe.

Avec Dan Ohlmann, le musée a acquis une réputation internatio­nale. Vous le ressentez ? Quand je suis à l’étranger, on me dit que c’est l’une des plus belles collection­s au monde. C’est avant tout un musée généreux. J’aime bien la phrase de John Hammond dans Jurassic Park : “J’ai dépensé sans compter.” J’ai un peu l’impression d’être là- dedans parce que je n’hésite pas, il faut que ça plaise aux gens, aux enfants, aux grands- mères, et à moi d’abord. Il n’y a pas de calcul marketing, pas d’agence derrière, c’est viscéral. On est en train de monter une collection type cinémathèq­ue : on archive costumes, accessoire­s, story- boards, scénarios, pellicules 35 mm pour la pérennité. C’est assez génial d’avoir la double joie de préserver un héritage culturel internatio­nal et en même temps de le montrer. Et les gens sont super heureux. Parfois, les gens me demandent : “Mais pourquoi les chaussures de Marty McFly ?” Je ne sais pas. Et pourquoi on serait en extase devant un tableau de Bacon ? C’est un objet manufactur­é avec passion et talent. Chacun a sa madeleine de Proust.

Vous considérez- vous comme le pendant populaire de l’Institut Lumière ?

Chez moi, il n’y a pas d’élitisme. J’ai autant envie d’exposer un scénario de Godard ou de Truffaut. On a la caméra d’Hitchcock de Vertigo. Il est considéré comme l’un des maîtres du cinéma à l’heure actuelle, mais on l’a pris pour un tâcheron qui faisait des films de série Z à l’époque. Qu’est- ce que cela veut dire ? C’était juste le regard des gens. N’empêche que si Truffaut n’avait pas mis en avant Hitchcock en disant “ce mec déchire”… On vient de récupérer des miniatures d’un film français, alors ce n’est pas du Star Wars, mais j’estime que ça a autant sa place au musée, ça fait découvrir aux gens de nouveaux trucs. Mais c’est sûr que chez certains acteurs du cinéma, il y a un peu d’élitisme, mais pas à Lyon. »

 ?? ?? Food Traboule 22 rue du Boeuf, Lyon 5e.
— Notre repas —
Deux poutines frites, comté, jus de poulet et canard crispy de chez Misto. Deux poulets frits karaage, sauce aigre douce de chez Yataï. Eau plate, eau gazeuse.
— L’addition — 39 €
Food Traboule 22 rue du Boeuf, Lyon 5e. — Notre repas — Deux poutines frites, comté, jus de poulet et canard crispy de chez Misto. Deux poulets frits karaage, sauce aigre douce de chez Yataï. Eau plate, eau gazeuse. — L’addition — 39 €

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