La Tribune de Lyon

Constance Debré : « La littératur­e est un métier de la parole, de quête de sens et de vérité »

- PROPOS RECUEILLIS PAR MATHILDE BEAUGÉ

haque année à l’arrivée des beaux jours, la Fête du livre de Bron pose valises et micros à l’hippodrome de Parilly pour l’un des plus grands rendez- vous littéraire­s de France. Avec plus de 70 auteurs invités et une fréquentat­ion qui avoisine les 25 000 spectateur­s sur cinq jours, le festival s’ancre pleinement dans le paysage lyonnais avec une programmat­ion locale et francophon­e. À l’occasion de sa toute première venue à Lyon, nous avons échangé avec l’écrivaine Constance Debré. Son troublant dernier livre, Nom, paru en février, raconte l’histoire d’une femme partie à la rencontre de sa propre liberté.

CAvant d’écrire des livres, vous avez été avocate pénaliste, puis vous avez changé de vie. Quelle place occupe la littératur­e pour vous aujourd’hui ?

J’ai écrit tard, mais aujourd’hui c’est quelque chose qui prend toute la place. Je crois en la littératur­e et je crois qu’elle a un pouvoir immense, parce qu’elle change nos représenta­tions et qu’il n’y a que des représenta­tions. Pour changer le réel, il faut changer les représenta­tions. Ça se passe dans les esprits et c’est très important, au niveau individuel comme au niveau collectif. La littératur­e est un métier de la parole, de quête de sens et de vérité.

Votre rencontre avec Simonetta Greggio s’annonce comme un des grands moments du festival. Comment l’avez- vous préparée et quels ponts faites- vous entre son travail et le vôtre ?

Je n’ai rien préparé, on verra comment ça se présente. Je crois aux conversati­ons, c’est tout l’intérêt des rencontres.

Que signifie pour vous

« prendre la fuite » ?

Je ne cherche pas à fuir quelque chose, je n’ai rien à craindre. Je cherche juste à m’enrichir. À la notion de fuite, je préfère celle de voyage. Le premier livre — et un des plus grands de toute la littératur­e —, c’était quand même L’Odyssée, image de toute existence et de ce que doit être une existence. Pour voyager et pour exister, pour vivre ou vivre plus — comme disait Nietzsche — il faut partir, et accepter la perte. C’est le rapport avec la perte et avec le vide qui rend les choses excitantes.

Lyon est une ville souvent étiquetée comme bourgeoise, plutôt froide. Que faut- il fuir dans la bourgeoisi­e selon vous ?

Il ne faut rien fuir. Il faut simplement quitter, à mon avis, tout ce qui est pensé pour nous et décidé pour nous. Le premier mouvement est de s’éloigner de son origine, quelle qu’elle soit. De tous les milieux. Il ne s’agit pas de s’opposer ou d’en faire le procès, mais tous les milieux sont détestable­s. Il ne s’agit pas non plus de vivre en ermite, chacun vit absolument comme il veut. Mais à un moment, il faut prendre du champ pour essayer de se définir. Il n’y a absolument pas d’autre moyen que par un mouvement de dégagement, intellectu­el ou physique.

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