« Pour comprendre, il faut regarder d’où je viens : je suis un ancien cancre »
Le patron du groupe hôtelier Les Aubergistes lyonnais ( hôtels Le Globe & Cecil, Le Simplon, Le Phénix) est parti 33 jours au Népal en octobre dernier, laissant ses 70 salariés en totale autonomie. Pour cet ancien « cancre » , une manière d’être premier de cordée autrement, d’assumer un regard marginal dans une profession souvent régie par le « chef, oui, chef » .
Partir 33 jours en sortie de crise sanitaire et laisser son entreprise derrière soi peut sembler contre- intuitif… Pourquoi faire ça ?
Loïc Renart : « Parce que comme vous l’avez dit, c’est contre- intuitif, et c’est ce qui m’attire. Et parce que mon job, je le fais à l’extérieur davantage qu’ici. Pour comprendre, il faut regarder d’où je viens. Je suis un ancien cancre, mais un “gentil cancre” bourgeois. J’ai loupé mon brevet des collèges et dans mon milieu, on n’avait pas vraiment le droit de le dire. J’ai mis du temps à comprendre que ce n’est pas le gamin qui est en échec dans ces situations, mais le système. J’ai vu récemment un reportage qui s’appelle Cancre ? justement : c’était comme si on mettait un mot sur un traumatisme que je ne m’avouais pas.
Une étiquette de cancre qu’il est dur de détacher, non ?
Mon milieu m’a permis d’avoir du temps, mes parents m’ont apporté de l’amour. Le hasard fait que je me suis accroché, car j’aurais pu finir fils à papa. J’ai fait deux BTS, l’apprentissage a été une révélation. Et en 2013, le CJD ( Centre des jeunes dirigeants d’entreprise) m’a demandé d’être son président. C’était surréaliste, moi qui souffrais encore d’un syndrome de l’imposteur ! C’est à cette période que j’ai assumé que je fonctionnais différemment. Depuis mes 12 ans, je partais avec mon père en ski de randonnée et j’ai toujours rêvé d’être guide de haute montagne. Derrière le rêve de montagne du gamin, c’était le rêve d’être leader d’un projet, d’embarquer des gens dans une aventure.
D’être premier de cordée, même si l’expression est connotée aujourd’hui…
Non, elle est belle, je suis un vrai premier de cordée dans ma vie professionnelle. Mais je suis un super second en montagne, j’adore être derrière un guide, être dans son pas. Ça me remet dans des postures d’humilité. En escalade, le même pas effectué en premier de cordée ou en second, je peux vous assurer que ce n’est pas du tout la même sensation. C’est une superbe inspiration.
« Mais Le Phénix est déjà en travaux, avec un hôtel à ouvrir, 15 recrutements à effectuer. On va déjà se réacclimater et se poser ! » , tempère le chef d’entreprise qui avait participé à une manifestation « pour la première fois de ma vie » fin 2020, contre le deuxième confinement.