La Tribune de Lyon

Le jazzman des Pentes

- ROMANE VILAIN

Pianiste et compositeu­r, Tchangodei est le patron du Bec de Jazz, un piano- bar réputé situé en plein coeur des Pentes.

et après- midi- là, l’énergie des danseurs, les effluves de bière et les notes de piano n’emplissent pas l’atmosphère. Dans la pénombre de son établissem­ent, seul le grand maître du jazz demeure. Dans ce coin des Pentes, tout le monde le connaît et l’apprécie, « même les flics ! » , glisset- il. Tchangodei, c’est un peu la figure du quartier. C’est l’histoire d’un selfmade- man au talent fou et à la carrière singulière. Tout commence dans les années 1970, lorsque, adolescent, Ferdinand Tchangodei débarque à Lyon. Dès lors, la ville deviendra « son unique pied- à- terre » qu’il retrouvera après chacune de ses multiples pérégrinat­ions. Arrivé sous les ponts de la Guillotièr­e, le jeune homme issu de parents béninois est parti de rien. Son talent inné et sa passion pour le piano deviennent alors un exutoire. « C’était la musique ou le banditisme » , confie- t- il dans l’intimité de son bar. Au gré des rencontres musicales, l’artiste se fait un nom et se produit avec

Cdes figures de la scène jazz, telles que Mal Waldron ou Sonny Simmons. Le jazzman des Pentes compte plus d’une vingtaine d’albums à son actif. Et sa carrière est loin d’être terminée. De prochains morceaux devraient sortir d’ici la fin de l’année.

40 ans de festivités. Les soirées chaudes du Bec de Jazz ont commencé dans un petit bar des quais de Saône, dans les années 1980. Aujourd’hui, les enfants des jeunes qui venaient y danser vont faire la fête dans le local croix- roussien. Les génération­s passent et le grand homme semble, lui, rester hors du « temps » , un concept qu’il n’apprécie guère. Ne lui parlez ni de son âge ni de sa carrière. L’unique chose qui lui tient à coeur, c’est l’instant présent. « Celui qui sait où il va dans la vie est un grand malade. L’inconnu est puissant, il ne faut pas en avoir peur » , glisse- t- il. Dans son univers bien singulier, Tchangodei fréquente poètes, peintres et musiciens, puisant son inspiratio­n à travers moments et rencontres. L’artiste s’est aussi mis à la peinture, un art qu’il pratique de la même manière que la musique : en laissant parler ses émotions et en ne se livrant qu’à son instinct. Et quand ça lui chante, Tchangodei monte encore sur les planches du Bec de Jazz pour enflammer la piste de danse, où s’entassent chaque week- end une diversité de fêtards venus célébrer le jazz.

L’artiste apprécie le quartier, qu’il compare aisément à Harlem,

« une banlieue où il n’y a rien » . Le restaurant voisin Le Jardin Gourmand est sa cantine et il s’entend bien avec le patron du Brélon, un atelier proposant des visites de la ville à solex ou mobylette.

« Celui qui sait où il va dans la vie est un grand malade. »

Jusqu’au 21 mai prochain, la galerie d’art- photo Le Bleu du Ciel expose le travail de Maxence Rifflet. Intitulé

Nos prisons, son projet photograph­ique s’apparente à une enquête documentai­re sur le milieu carcéral français et donne un certain regard sur cette institutio­n que constitue la prison. Commencé en 2016, le projet a été réalisé dans sept prisons françaises, en cocréation avec les détenus.

12 rue des Fantasques, Lyon 1er. Du mercredi au samedi de 14 h 30 à 19 h.

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