La Tribune de Lyon

Le passeur de mémoires

- ROMANE VILAIN

Professeur et metteur en scène, Dominique Lurcel est le fondateur de la compagnie de théâtre Passeurs de Mémoires.

a génération Cohn- Bendit a toujours les yeux qui pétillent. À presque 79 ans, Dominique Lurcel est encore sous le feu des projecteur­s, voyageant d’une ville à l’autre, franchissa­nt les portes des théâtres aussi bien que les grilles des lycées pour transmettr­e sa passion. Difficile de rendre compte d’une carrière aussi étendue et brillante que la sienne sur un bout de papier. Tout a commencé à Paris, sa ville d’origine. Après des études théâtrales, le passionné d’histoire deviendra finalement professeur de lettres. Et pas dans n’importe quel établissem­ent. Dominique Lurcel est l’un des fondateurs du lycée autogéré de Paris, dans lequel il a enseigné une quinzaine d’années. La vie de l’enseignant sera marquée par des rencontres majeures, dont la première est celle avec le dramaturge Armand Gatti. C’est ainsi que débute sa carrière en tant que metteur en scène à travers l’adaptation des textes du poète. S’il

Ldélaisse son poste au lycée à la fin des années 1990, Dominique a toujours conservé la fibre enseignant­e. « J’ai besoin de travailler avec les jeunes, c’est mon moteur » , lance- t- il.

Théâtre militant. Éprouvant le besoin d’exprimer son propre regard sur le monde, Dominique Lurcel décide de créer sa compagnie en 1997, dénommée Les Passeurs de Mémoires. Ses premières pièces, Conversati­ons avec Primo Levi ou Nathan Le Sage, sont encore jouées aujourd’hui. Le metteur en scène est un amoureux du réel, privilégia­nt la profondeur des textes à l’opulence des décors. Toutes ses réalisatio­ns délivrent un message, d’Une Saison de machettes racontant l’enfer tutsi à Folies coloniales : Algérie années 30, véritable plaidoyer contre les déboires du colonialis­me. Une partie de ses oeuvres est consacrée à la guerre d’Algérie qu’il cherche à retranscri­re par la mise en scène de témoignage­s poignants tel celui de Mouloud Feraoun, écrivain algérien assassiné par l’OAS ( Organisati­on de l’armée secrète). Le metteur en scène poursuit ce travail de mémoire par l’animation d’ateliers de théâtre avec les lycéens des banlieues parisienne­s et villeurban­naises. Sa prochaine représenta­tion lyonnaise se déroulera au théâtre des Célestins en décembre prochain, dans le cadre des 60 ans des accords d’Évian. L’occasion, pour le grand homme, de remonter sur les planches pour livrer ses messages, animer le débat et... faire passer les mémoires.

« J’ai besoin de travailler avec les jeunes, c’est mon moteur. »

Arrivé à Lyon par amour, Dominique s’est installé tout près du Rhône qui lui rappelle la Seine parisienne. Chaque mardi, il se rend au marché de la Croix- Rousse, un quartier qu’il adore car

« c’est un lieu de mémoire et de lutte » .

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France