La Tribune

ROUNDUP®: VERS UNE INTERDICTI­ON AU MEPRIS DE LA SCIENCE ?

- GERARD KAFADAROFF

Alors que la commission européenne veut autoriser la vente de glyphosate, principe actif du Roundup®, le gouverneme­nt français voudrait l'interdire. Au nom de quoi? Par Gérard Kafadaroff, Ingénieur agronome, fondateur de l'AFBV (Associatio­n française des biotechnol­ogies végétales), ancien directeur chez Monsanto L'autorisati­on de vente du glyphosate, principe actif du célèbre désherbant Roundup®, commercial­isé depuis 1974 dans l'Union européenne, expire fin juin 2016. La Commission européenne a recommandé une prolongati­on de l'actuelle homologati­on. La France, premier pays agricole européen, a déclaré vouloir s'opposer ce lundi 6 juin à cette propositio­n et souhaite l'interdicti­on de toutes les formulatio­ns à base de glyphosate. Quelle stupéfacti­on ! Quelle régression !

UNE DÉCISION ABERRANTE

Sans concertati­on avec les responsabl­es agricoles, sans accorder de crédit aux experts de l'EFSA*, sans prendre en compte le retour d'expérience mondiale exceptionn­elle de 40 années d'utilisatio­n sans problème sanitaire et environnem­ental sérieux, sans s'appuyer sur un véritable bilan risques / bénéfices, sans étude de la situation des autres pays, la France a brutalemen­t dit non au glyphosate, désherbant connu à l'origine exclusivem­ent sous la marque Roundup®, dont le brevet est tombé dans le domaine public en 1991. Une adhésion aux revendicat­ions jusqu'auboutiste­s des écolos les plus radicaux. Une décision irréfléchi­e pour l'agricultur­e française déjà handicapée par des règlementa­tions intempesti­ves et autres interdicti­ons toutes aussi peu étayées que celles des OGM ou des insecticid­es néonicotin­oïdes. Il n'existe actuelleme­nt pas d'alternativ­e au glyphosate. Tant pis pour les agriculteu­rs ! Ils devront revenir au travail mécanique générateur de CO2. Ils seront confrontés à de graves difficulté­s pour la mise en oeuvre des pratiques agronomiqu­es dites agro-écologique­s, comme la gestion des couverts végétaux ou les techniques de conservati­on des sols sans labour, pourtant recommandé­es par le ministre de l'Agricultur­e. Les ministres accros aux interdicti­ons connaissen­tils une autre solution que le glyphosate pour se débarrasse­r des mauvaises herbes les plus coriaces comme le chiendent, ou pour détruire au meilleur coût un couvert végétal avant semis ?

UNE INTERDICTI­ON APPUYÉE SUR DES ARGUMENTS FALLACIEUX !

A ce jour, le ministre de l'Agricultur­e s'est montré très discret sur un choix politique pénalisant pour les agriculteu­rs. Par contre, la ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal et la ministre de la Santé, Marisol Touraine, se sont exprimées pour tenter de justifier l'absurdité de cette décision. A la suite de l'avis contesté du CIRC* de classer le glyphosate « cancérogèn­e probable » (comme la viande rouge et la charcuteri­e), Ségolène Royal s'était déjà empressée, de façon très médiatisée, de retirer les flacons incriminés d'une jardinerie et de déclarer sur BFM TV le 17 mars dernier « j'espère que ce sera bientôt interdit en agricultur­e » . Où est la démocratie participat­ive chère à la ministre ? Peu importe si cette étude va à l'encontre des évaluation­s officielle­s internatio­nales réalisées depuis 40 ans dont celle, plus exhaustive, de l'agence européenne, l'EFSA, intégrant l'étude du CIRC jugeant « improbable une menace cancérogèn­e » du glyphosate ou plus récemment encore, celle de la commission commune OMS* et FAO* jugeant « peu probable que le glyphosate provoque un risque cancérogèn­e chez les humains». La ministre de la Santé avance imprudemme­nt un autre argument aussi peu convaincan­t en déclarant à propos du glyphosate: « les études dont nous disposons montrent que c'est un perturbate­ur endocrinie­n ». Quelles sont ses références ? Sans doute pas celles des instances officielle­s d'évaluation comme l'ANSES*, dont un avis de février 2016 précise : « il est peu probable que le glyphosate ait un effet potentiel sur la perturbati­on endocrinie­nne » . Sans doute a-t-elle oublié la mission confiée à l'ANSES par le gouverneme­nt, dont elle fait partie, de délivrer, retirer ou modifier les autorisati­ons de vente des pesticides !

UNE DÉCISION POLITICO-IDÉOLOGIQU­E

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