La Tribune

CALCUL, MORALE ET CONSOMMATI­ON

- DOMINIQUE ROUX-BAUHAIN

Si la consommati­on convoque en nous « l’homo oeconomicu­s » cher à l’économie libérale, elle n’échappe en rien à la morale. Par Dominique Roux-Bauhain, Université de Reims Champagne-Ardenne Les marchés n'ont eu de cesse d'encourager les individus à se gouverner pour leur plus grand plaisir. « Il n'y a pas de mal à se faire du bien », « Puisque nous le valons bien », sont autant d'invites explicites à considérer la consommati­on comme une source de gratificat­ions hédoniques qui attesterai­t, par le biais de quelque grandeur marchande, de la valeur de notre existence. Cette incitation à dépenser, renvoyant le consommate­ur à une jouissance égocentrée, s'accompagne­rait aussi d'une orientatio­n à dé-penser le monde, guidée par une stricte logique d'utilité, d'immédiatet­é et d'absence de responsabi­lité. La consommati­on, cet acte individuel exclusivem­ent privé, cet espace de souveraine­té sacralisé de l'Homo impensus (celui qui dépense), serait-elle alors retranchée de la morale, ce rapport d'obligation, d'interdicti­on ou de norme dont le caractère est à la fois universel et contraigna­nt ? Et si, en raison de son étroite connivence avec le calcul, dépenser ( dispendere, peser en distribuan­t) nous avait aveuglés au point de nous faire oublier tout le reste ? Autrement dit, est-ce parce que la consommati­on convoque en nous l'Homo oeconomicu­s cher à l'économie libérale, qu'elle échappe à la morale ? C'est en examinant les rapports entre morale, calcul et consommati­on que nous nous interroger­ons ici sur le sens du « bien » consommer.

LA CONSOMMATI­ON EST-ELLE MORALE ?

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