"LA REVOLUTION CONSERVATRICE A CONTRIBUE A L'EXPLOSION DES INEGALITES" (DANIEL COHEN)
Désindustrialisation, mutations du monde du travail, financiarisation de l'économie, numérique et algorithme, intelligence artificielle sont les thèmes abordés dans le dernier ouvrage de l'économiste Daniel Cohen "Il faut dire que les temps ont changé. Chronique (fiévreuse) d'une mutation qui inquiète." Dans un entretien accordé à La Tribune, le directeur du département d'économie de l'ENS explique que "la révolution numérique a terrassé l'ancien monde" et appelle à "réinventer une nouvelle critique sociale qui ouvre une brèche dont le nouvel impératif de croissance est en train de reconfigurer nos vies." LA TRIBUNE - Pourquoi avez-vous choisi de traiter des mutations économiques et sociales sur les 50 dernières années ? DANIEL COHEN - Je voyais venir les 50 ans de mai 68. C'est toute ma vie qui est passée au cours de ces 50 dernières années. J'avais envie de me replonger dans toutes ces lectures qui avaient égrené ma jeunesse surtout dans les années 70. J'avais lu beaucoup de livres et je n'étais pas sûr de les avoir tous compris. Les grands auteurs de l'époque Lévi-Srauss, Lacan, Deleuze m'ont particulièrement marqué. J'ai eu envie de comprendre comment une génération comme la mienne, qui a assisté à la montée des protestations et du féminisme, de discours d'autonomie, d'émancipation, pouvait être le témoin de cette montée du populisme. Je voulais revenir sur les ouvrages que j'avais écrit au fil de ma carrière, un ouvrage sur la société postindustrielle, un autre intitulé "Nos temps modernes".