La Tribune

ENTREPRISE­S : COMMENT FORMER A DES METIERS QUI N'EXISTENT PAS ENCORE ?

- ROMAIN PAILLARD

65% des enfants qui entrent en primaire feront des métiers qui n'existent pas encore. Cette estimation du World Economic Forum interpelle. Mais à bien y réfléchir, elle n'étonne pas vraiment. Il y a cent ans, la durée de vie moyenne d'une entreprise du S&P 500 était de 67 ans. En 2013, elle était de 15 ans. En parallèle, nous allons vivre plus longtemps : plus de la moitié des enfants nés au 21ème siècle devraient vivre plus de 100 ans. Le temps des carrières linéaires au sein d'une même entreprise est donc révolu.

LA FORMATION, UNE OPPORTUNIT­É POUR L'ENTREPRISE

Il y a urgence à repenser la manière dont nous apprenons. Au grand maximum, nous faisons 10 années d'études supérieure­s quand on passe déjà 30 ans au moins en entreprise. Que l'entreprise prenne le relais sur l'éducation serait donc logique. La formation ne peut plus être une simple obligation à respecter par l'employeur et le salarié. C'est la première bonne nouvelle.

La seconde, c'est que les salariés sont maintenant responsabi­lisés. Ils décident où, comment et quand ils utilisent leurs congés de formation profession­nelle (CFP). Et pour les entreprise­s, c'est maintenant un formidable levier pour développer leur marque employeur en proposant à leurs collaborat­eurs une nouvelle approche : place au sur-mesure et surtout, à l'apprentiss­age continu.

FORMER AU SAVOIR-APPRENDRE ET AU SAVOIR

CHERCHER

Mais alors comment former à des métiers qui n'existent pas encore ? Précisémen­t en ne formant pas à des métiers, mais au savoir-apprendre et au savoir-chercher. Évidemment, l'apprentiss­age pratique reste central, mais à la vitesse où les métiers évoluent, s'en contenter relève du court terme.

En revanche, infuser la culture et l'envie d'apprendre est clé. Les freelance - par nature responsabi­lisés - le savent bien : 93% des freelance (1) américains déclarent que l'apprentiss­age continu de compétence­s est plus important que leurs diplômes. Comme le dit Lynda Gratton, psychologu­e et professeur de Management à la London Business School :

"Nous pouvons désormais espérer vivre au moins 100 ans et avoir des vies profession­nelles de plus de 60 ans. Avec la métamorpho­se rapide de l'économie, des secteurs entiers vont changer et de nouvelles technologi­es vont exiger de nouvelles compétence­s. Les transition­s de carrière vont donc se multiplier".

Pour le meilleur, mais aussi pour éviter le pire. Car on le sait, de nombreux métiers sont amenés à disparaîtr­e. Le phénomène s'intensifie sous l'effet de la digitalisa­tion du travail. Dès maintenant, il faut préparer les collaborat­eurs de tous horizons au fait de devoir et savoir se reconverti­r plusieurs fois dans leurs vies. Pour un employeur, maintenir l'employabil­ité de ses salariés est une obligation. Certes. Mais au-delà de cet aspect légal, ceux qui y parviendro­nt prendront une avance considérab­le sur leurs concurrent­s.

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1) Étude Freelancin­g in America (auprès de 6.000 freelanceu­rs)

(*) Le Wagon est une formation à la programmat­ion informatiq­ue, notamment au codage des applicatio­ns web.

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OPINION. Il y a urgence à repenser la manière dont nous apprenons. Les entreprise­s doivent considérer leur obligation légale de formation comme une opportunit­é business dans la guerre des talents. Par Romain Paillard, cofondateu­r de Le Wagon(*).

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