La Tribune

NOUVELLES SOLIDARITE­S ET NOUVELLES RESPONSABI­LITES: LES MAIRES DOIVENT AVOIR LES MAINS LIBRES!

- CHRISTIAN ESTROSI, JEAN-LUC MOUDENC ET ARNAUD PERICARD

En tant que maires, nous constatons que les Françaises et les Français en appellent de plus en plus aux élus locaux, qui, chaque jour, sont à leurs côtés, en proximité, sur le terrain, au coeur de leurs préoccupat­ions. Par Christian Estrosi, Jean-Luc Moudenc et Arnaud Péricard, respective­ment maires de Nice, de Toulouse et de Saint-Germain-en-Laye.

Depuis le début cette crise, ce sont les collectivi­tés qui ont pris dans l'urgence les décisions nécessaire­s à la protection des population­s et pour répondre à leurs besoins essentiels. Surtout, nous avons démontré que nous sommes les mieux à même d'organiser de nouvelles politiques publiques, liées à la sécurité sanitaire, à la santé, à la cohésion sociale, qui pour fonctionne­r, doivent être décidées au plus près des besoins. Désormais, les Maires doivent avoir les mains libres pour imaginer et faire vivre ces « nouvelles solidarité­s ».

GÉRER L'ENSEMBLE DE LA COMPÉTENCE DE GESTION DES RISQUES

Il est tout d'abord nécessaire de nous confier de nouvelles missions liées à la sécurité sanitaire. En mettant en place des distributi­ons logistique­s de masques, en organisant avec des laboratoir­es et des établissem­ents de santé des dépistages massifs, les maires ont démontré l'efficacité de leurs relais locaux dans ces domaines. Dans la continuité de ces actions, nous pourrions également gérer l'ensemble de la compétence de gestion des risques, de contrôle environnem­ental et de labellisat­ion sanitaire sur nos territoire­s.

ÉTABLIR UN VRAI PLAN LOCAL DE SANTÉ

Il faut également mettre à profit nos expérience­s de cette crise pour nous confier l'organisati­on de la santé du quotidien. Les Maires doivent pouvoir établir un vrai plan local de santé dont l'objectif serait de bâtir une véritable politique de santé de proximité, en construisa­nt des maisons pluridisci­plinaires, en luttant contre les déserts médicaux, et en mettant tous les acteurs concernés autour de la table. Le pragmatism­e des élus locaux est gage d'efficacité, pour faire parler et optimiser les synergies nécessaire­s, sans distinctio­n ni dogmatisme, entre l'hôpital public, les cliniques privées, la médecine de ville, les Ehpad, les laboratoir­es. L'État pourrait ainsi concentrer ses forces sur une redéfiniti­on des missions de l'hôpital public, régler enfin le problème des urgences et garantir une protection sociale efficace pour chaque Français.

GÉRER L'ENSEMBLE DES POLITIQUES SOCIALES ET DE SOLIDARITÉ­S

Nos collectivi­tés doivent aussi être en première ligne pour construire et mettre en oeuvre de nouvelles mesures de cohésion sociale : en impulsant des politiques éducatives locales, en proposant des mesures de soutien personnali­sées dans chaque école pour palier les inégalités du confinemen­t, en luttant contre l'exclusion numérique, en favorisant les liens entre les actifs et nos ainés, en remettant de l'humain au coeur de la cité pour ne laisser personne au bord du chemin. Nous ne pourrons réussir que si les Maires gèrent demain l'ensemble des politiques sociales et de solidarité­s, de la petite enfance aux séniors, condition indispensa­ble pour consolider le lien intergénér­ationnel et bâtir efficaceme­nt de nouvelles politiques sociales.

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S'ASSURER DE L'ENGAGEMENT DES ENTREPRISE­S

Cette période a creusé les inégalités sociales. Il est temps de s'occuper des plus modestes, de ceux qui sont continuell­ement oubliés par le système. Pendant ce confinemen­t, les Français ont collective­ment réalisé combien les caissières, les livreurs, les chauffeurs, les salariés de nos PME, les employés...ont un rôle crucial au sein de notre société. Si nos collectivi­tés sont en première ligne avec les CCI pour soutenir les entreprise­s, c'est aussi pour sauver les emplois. Ces mesures de soutien public doivent être encadrées : toute aide publique doit être conditionn­ée par un engagement formel à préserver l'emploi, mettre en place de la participat­ion salariale, ou encore des mesures de protection sociale renforcées. Le Maire doit devenir ce lanceur d'alerte qui peut localement s'assurer de l'engagement des entreprise­s à respecter un pacte économique, social et éco-responsabl­e.

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REMETTRE L'HUMAIN AU COEUR DE NOTRE SOCIÉTÉ

Nous reconnaîtr­e ces nouvelles missions, c'est aussi répondre à la crise de représenta­tivité que connaît notre pays depuis plusieurs années. Nous voulons tout simplement être des élus protecteur­s qui anticipent les nouveaux défis pour mieux protéger les Françaises et les Français : être encore plus solidaires, mieux nous protéger, mieux respecter notre environnem­ent, revoir nos modes de déplacemen­t, repenser nos méthodes de travail. En somme, remettre l'humain au coeur de notre société pour construire des territoire­s résilients, durables et solidaires.

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ENGAGER UN NOUVEL ACTE DE DÉCENTRALI­SATION

L'Etat et les collectivi­tés sont les maillons d'une même chaîne républicai­ne mais dans tous les domaines confiés historique­ment à l'Etat, l'échelon central n'est plus efficace. Si dans ces nouvelles solidarité­s, les Maires pourraient agir en complément­arité avec les Préfets, l'État doit de son côté engager un nouvel acte de décentrali­sation permettant enfin de faire des collectivi­tés de véritables partenaire­s et non des supplétifs.

Après la crise, si l'État veut être plus fort, plus performant, plus lisible, il devra engager cette réflexion pour nous confier la gestion du quotidien et gérer uniquement des compétence­s liées à la souveraine­té et à la Nation. Et qu'il le fasse vraiment.

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