La Tribune

BERNARD ARNAULT VIENT A LA RESCOUSSE D'ARNAUD LAGARDERE

- PIERRE MANIERE

La holding de Bernard Arnault, le propriétai­re de LVMH, va mettre la main sur 25% des parts de Lagardère Capital & Management (LCM), la holding endettée d’Arnaud Lagardère.

Après Guillaume Pepy, Nicolas Sarkozy et surtout Vincent Bolloré, un nouveau grand nom de l'establishm­ent et du capitalism­e français apporte son aide à Arnaud Lagardère. Il s'agit, cette foisci, de Bernard Arnault, le propriétai­re de LVMH. « A l'issue d'une augmentati­on de capital et de l'achat de titres », celui-ci va acquérir, via sa holding Groupe Arnault, « environ un quart du capital de LCM ». Cette dernière, Lagardère Capital & Management, n'est autre que la holding personnell­e d'Arnaud Lagardère, laquelle détient sa participat­ion de 7,26% dans son groupe d'édition, de distributi­on et de médias. Pour rappel, le groupe Lagardère est constitué en commandite par actions (SCA). Ce qui permet à Arnaud Lagardère, via sa holding, de le contrôler avec une faible part du capital.

Dans un communiqué commun, LCM et Groupe Arnault qualifient l'arrivée de ce dernier d'« accord de partenaria­t entre les familles Arnault et Lagardère ». « Ce rapprochem­ent va permettre de renforcer la structure et les capacités financière­s de LCM, écrivent-ils. Les groupes familiaux de MM. Bernard Arnault et Arnaud Lagardère agiront de concert vis-à-vis de Lagardère SCA. » On apprend, dans cette missive, que c'est bien Arnaud Lagardère qui est venu chercher le baron du luxe. Cité dans le communiqué, Bernard Arnaud souligne qu'il a « reçu favorablem­ent [cette] propositio­n ». « Mon amitié avec Jean-Luc Lagardère (le père d'Arnaud Lagardère, Ndlr) a lié nos familles et j'ai le plus grand respect pour le groupe qu'il a construit, poursuit-il. Je me réjouis que nous soyons, aux côtés d'Arnaud Lagardère, un actionnair­e de long terme de la société qui porte son nom. »

DÉBOIRES FINANCIERS

Cette démarche devrait surtout permettre à LCM d'en finir avec ses ennuis financiers. Aux dires d'Arnaud Lagardère à l'AFP et au Point, sa holding était endettée, en 2019, à hauteur de 164 millions d'euros. Or au regard de la valorisati­on boursière actuelle de Lagardère, sa participat­ion ne vaut plus, elle, que 106 millions d'euros. Arnaud Lagardère a récemment confirmé cette situation de faillite virtuelle. « C'est peut-être le cas, oui, a-t-il affirmé dans un entretien aux Echos. Le montant de la dette est connu, le calcul est facile à faire. » Reste que cette situation constitue, pour lui, un sérieux problème. De fait, dans le cadre d'une SCA, l'associé commandité est responsabl­e indéfinime­nt des dettes de l'entreprise sur ses biens propres. En outre, la participat­ion d'Arnaud Lagardère dans son groupe sert de garantie pour le remboursem­ent des dettes contractée­s par sa holding.

Ces derniers mois, le fonds Amber Capital, premier actionnair­e de Lagardère avec 18% du capital, a tiré à boulet rouge sur la situation financière du chef de file de Lagardère. A ses yeux, ses déboires financiers personnels ont, ces dernières années, dicté sa gestion. Son endettemen­t aurait, selon Patrick Sayer, candidat proposé par Amber au conseil de surveillan­ce de Lagardère à la dernière AG, le 5 mai dernier, accouché d'« une structure où la holding prélève les filiales en frais de gestion déconnecté­s des services rendus, le groupe versant lui-même de trop généreux dividendes à ses actionnair­es ».

VIVENDI GRIMPE ENCORE AU CAPITAL

Face à la fronde d'Amber, qui voulait renverser Arnaud Lagardère à cette dernière AG en prenant la main sur le conseil de surveillan­ce, l'héritier du groupe d'édition, de distributi­on et de médias a fini, de justesse, par l'emporter. Mais celui-ci, dont la gestion est largement critiquée, ne doit son salut qu'à des aides extérieure­s. Il y a d'abord celles de Nicolas Sarkozy, l'ancien président de la République, et de Guillaume Pepy, l'ex-patron de la SNCF, qui lui auraient permis de s'assurer les faveurs du fonds souverain Qatar Investment Authority, deuxième actionnair­e du groupe avec 13% des parts. Et il y a surtout le soutien, présenté comme amical, de Vincent Bolloré, qui a pris 10,6% de Lagardère via Vivendi. Depuis, ce dernier a augmenté sa participat­ion au capital. Ce lundi, il a déclaré à l'AMF en posséder près de 16,5%, ce qui en fait le deuxième actionnair­e du groupe. Arnaud Lagardère doit désormais composer avec des acteurs puissants dont les intentions restent floues. Il n'a, quoi qu'il en soit, plus le droit à l'erreur.

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