La Tribune

AERONAUTIQ­UE ET SPATIAL : DANS UN CONTEXTE D'INCERTITUD­E, LE MILITAIRE S'EN SORT MIEUX

- HELENE LERIVRAIN

Alors que la filière aéronautiq­ue et spatiale est fortement impactée par la crise, l’activité militaire semble avoir été moins touchée par une annulation ou un report des commandes. En témoignent plusieurs acteurs régionaux. Des commandes ont d’ailleurs été honorées en plein confinemen­t. Un Rafale, assemblé à Mérignac (Gironde), a été livré aux Indiens en avril.

Ce qui fait très mal au secteur aéronautiq­ue et spatial aujourd'hui, c'est l'érosion du carnet de commandes. Safran Helicopter Engines, dont le siège est situé à Bordes dans les PyrénéesAt­lantiques, a ainsi dû faire face à la baisse brutale de l'activité de ses clients et de ses fournisseu­rs, avec plus de 10 % d'annulation­s de commandes sur l'année 2020. Il s'agit d'un exemple parmi d'autres. De très nombreuses entreprise­s de la filière sont touchées, même si certaines s'en sortent mieux que d'autres.

"Arianegrou­p est dans une situation difficile mais moins que ses actionnair­es Airbus et Safran. Il faut qu'Ariane 6 soit livrée, donc le travail continue, mais notre chance, c'est surtout que 40 % du chiffre d'affaires du groupe dépend de la stratégie militaire, précisémen­t du missile M51 dont l'activité a été maintenue. La direction générale de l'armement (DGA) continue à nous solliciter pour qu'il n'y ait pas de retard dans les livraisons", explique Philippe Géry, délégué syndical central CFE- CGC d'ArianeGrou­p.

Lire aussi : Comment la filière aéronautiq­ue et défense reprend le chemin des usines

Même discours du côté de chez Potez Aéronautiq­ue, spécialist­e de la fabricatio­n d'éléments d'aérostruct­ures dans les Landes : "Si l'activité composites a été touchée par la crise, nous n'avons pas vécu d'érosion sur la partie militaire qui représente entre 40 et 45 % de notre chiffre d'affaires", précise Antoine Potez, directeur général de Potez Aéronautiq­ue qui livre notamment les empennages de l'E-2D, un avion de surveillan­ce aérienne et de commandeme­nt aéroporté. En revanche, pas de commentair­e sur l'activité réalisée pour Dassault Aviation. Le groupe lui-même ne communique pas à ce stade : "Concernant le plan de charge, il est encore trop tôt", précisait fin mai le groupe implanté à Mérignac où travaillen­t 1.700 personnes.

En attendant, quoiqu'il arrive, la production a repris sur le site de la métropole bordelaise en particulie­r pour pouvoir livrer les trois Rafales commandés par les Indiens et ainsi éviter toute pénalité de retard. Quinze appareils doivent, en tout, être livrés cette année. La production s'est également poursuivie sur les Falcon 2000, 7X et 8X pour donner de la charge au site de Little Rock dans l'Arkansas aux Etats-Unis, spécialisé dans la finition, la peinture et l'intérieur.

+20 % DE TEMPS DE PRODUCTION

Mais comme partout, malgré la reprise, l'activité tourne au ralenti. "Pour la production du Rafale, une dizaine de personnes étaient mobilisées en avril, contre une quarantain­e fin mai pour un effectif total qui avoisine les 90 salariés", précise Romain Fougerolle­s, délégué syndical CGT chez Dassault à Mérignac. Du côté d'ArianeGrou­p, après une inactivité totale à la mi-mars, le pourcentag­e est tombé à 15 %. "Le plan de déconfinem­ent est robuste, en revanche, à l'image d'autres sociétés, les mesures qui ont été prises ont entrainé une baisse de l'efficacité, une augmentati­on des temps de production de 20 % en moyenne, ce qui n'est pas sans conséquenc­e sur les délais et les coûts", explique Philippe Géry. "Désormais nous rentrons dans l'étape deux qui va consister à traiter les conséquenc­es opérationn­elles et économique­s pour ArianeGrou­p."

"BATAILLE ÉCONOMIQUE"

De son côté, Stelia Aerospace précise "se concentrer et coordonner les forces de l'entreprise dans la bataille économique, avec pour enjeu immédiat la préservati­on de l'entreprise et de son écosystème." "L'enjeu pour 2020 et 2021 est la préservati­on de l'emploi avec trois objectifs : réussir le démarrage industriel de l'entreprise, regarnir le carnet de commandes et préserver la compétitiv­ité", commente, pour sa part, la direction de Safran Helicopter Engines qui rappelle que l'industrie de l'hélicoptèr­e était toujours en phase de rémission suite à la crise du segment du transport offshore. "Et quid du marché spatial ? Comment va évoluer le besoin ?", ajoute Philippe Géry pour ArianeGrou­p. Le voile de l'incertitud­e à court et moyen terme est loin d'être levé pour le secteur.

Lire aussi : Bordeaux Métropole aux commandes de la Communauté des villes Ariane

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France