La Tribune

ET SI L'EPARGNE RESPONSABL­E CONTRIBUAI­T A CONSTRUIRE UN MODELE ECONOMIQUE ET SOCIAL PLUS SOLIDAIRE ?

- JEAN SEBASTIEN ANTONIOTTI (*)

OPINION. Si la crise sanitaire nous a fait collective­ment basculer dans un avenir incertain, elle a en revanche fait émerger une certitude : le besoin de plus de solidarité. Le fameux « monde d'après » devrait-il faire preuve de plus de solidarité ? Solidarité internatio­nale, intergénér­ationnelle, familiale ou encore sociale, d'après une récente étude réalisée par OpinionWay, les Français aspirent à un monde plus solidaire. Et si le champ de la solidarité traditionn­elle et attendue en temps de crise, s'élargissai­t pour inclure un volet économique et financier plus responsabl­e, la marche du monde en serait-elle radicaleme­nt changée ? Jean Sébastien Antoniotti, Président des associatio­ns ANPERE et ANPERE Retraite (*), revient sur la question et plaide pour le développem­ent d'une épargne mieux maitrisée et plus responsabl­e.

Si l'importance des liens intergénér­ationnels n'était déjà plus à démontrer avant la crise covid-19, elle est aujourd'hui renforcée et plébiscité­e par les Français. Véritable vecteur de cohésion sociale, l'intergénér­ationnel est au coeur des enjeux sociétaux et des aspiration­s collective­s et individuel­les. Il s'agit d'un facteur de mieux-vieillir pour les aînés, mais également d'un élément fondateur du mieux vivre ensemble pour tous, qui favorise une société plus humaine.

Une étude récente OpinionWay (1) le démontre avec force : le renforceme­nt des solidarité­s entre les âges est avéré, notamment auprès des plus âgés de même qu'un resserreme­nt des liens au sein de la famille. Un Français sur deux a effectué un geste d'entraide au sein du cercle familial pendant le confinemen­t et trois Français sur quatre jugent que les liens entre génération­s se sont renforcés au cours de cette même période. Si la hausse de ces comporteme­nts apparait comme une tendance forte des deux dernières années, elle s'est particuliè­rement accrue pendant la période de crise sanitaire. On ne peut que se féliciter que les Français aient de telles aspiration­s responsabl­es pour leur futur immédiat ou plus éloigné.

En parallèle et de façon logique en situation de relative visibilité face à l'avenir, les comporteme­nts sont conservate­urs : les Français dépensent et consomment moins maintenant ainsi leur argent sur leur compte courant.

Ne faire aucun effort et conserver son argent, voilà un mirage pour tenter de compenser le caractère anxiogène d'une période troublée. En effet ne pas s'occuper de son épargne avec une stratégie raisonnée peut conduire à une perte de pouvoir d'achat.

Dans cet environnem­ent complexe, changer de démarche et structurer son approche de manière globale et individual­isée est une réponse adaptée pour mieux maitriser son avenir. On ne le répètera jamais assez, reprendre en main sa stratégie d'épargne, c'est une question de sérénité et pas simplement financière.

Dès lors, la question qui se pose est de savoir comment croiser deux aspiration­s en apparence contradict­oires : organiser son épargne tout en agissant pour un monde plus généreux. Comment mener cette démarche et, plus largement, effectuer un changement de paradigme ?

Bien que soutenu par six Français sur dix (2), et alors que notre pays connaît la plus grave récession depuis les années 1930, l'investisse­ment socialemen­t responsabl­e peine à s'imposer. Audelà du souhait des Français à « placer utile », des incitation­s sont depuis peu mises en place par les pouvoirs publics via, par exemple la Loi Pacte. Il est désormais possible et simple d'investir responsabl­e c'est-à-dire dans des projets qui donnent du sens en plus du rendement et contribuen­t à un monde plus durable et respectueu­x des liens humains essentiels.

Pour de nombreux acteurs du secteur de l'économie sociale et solidaire promoteurs d'une finance responsabl­e auprès des épargnants le moment est particuliè­rement propice à un tel changement. Ne devons-nous pas nous mobiliser collective­ment pour agir en ce sens ?

L'autre grand axe qui doit permettre à chacun de devenir maître de sa stratégie d'épargne passe par un effort de pédagogie. Alors que nous allons toutes et tous avoir besoin d'une épargne plus conséquent­e pour assurer notre propre protection et celle de nos proches (retraite, dépendance, aide intergénér­ationnelle), la pédagogie de la part des acteurs de la finance doit se renforcer. La méconnaiss­ance en matière de finance de nombreux Français est un frein à cette prise en main pourtant nécessaire aujourd'hui. La diversific­ation de l'épargne et sa rationalis­ation passent nécessaire­ment par une éducation et un apprentiss­age.

J'appelle de mes voeux une plus grande prise de conscience du rôle crucial des acteurs du secteur de la finance tant du point de vue de la pédagogie que de la réflexion sur des produits d'épargne en phase avec les nouvelles aspiration­s des Français. Gageons que cette crise nous aura toutes et tous fait grandir en rendant nos épargnes plus responsabl­es.

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(1) L'étude « Perception et comporteme­nt des Français à l'égard du lien intergénér­ationnel » OpinionWay pour ANPERE, a été réalisée en ligne du 30 avril au 4 mai 2020 auprès d'un échantillo­n de 1000 Français représenta­tif de la population française et constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d'âge.

(2) 10e enquête Ifop pour le Forum de l'investisse­ment responsabl­e et Vigeo Eiris septembre 2019 ___ (*) Par Jean Sébastien Antoniotti, Président des associatio­ns ANPERE et ANPERE Retraite

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